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Dans le monde
Ukraine : la guerre avec la peau des peuples
Le bombardement, par les forces de Kiev, d’un marché de Donetsk, la capitale d’une des deux régions de l’est de l’Ukraine rattachées à la Russie, a fait au moins 27 morts et des dizaines de blessés.
Ce n’est pas la première fois que l’armée ukrainienne vise la population civile du Donbass. Cela a commencé dès 2014, lorsque se sont constituées les républiques séparatistes de Donetsk et de Lougansk. La nouveauté est que les médias français en parlent. Quitte, pour certains, à ajouter que, comme dans le cas des bombardements de plus en plus fréquents de villes russes frontalières, telles que Belgorod et Rostov, cela répond aux tirs de missiles russes sur les populations civiles ukrainiennes de Kiev, Kharkiv, Lviv, etc. C’est une façon d’avouer que les belligérants russes, ukrainiens et, dans ce cas, leurs soutiens militaires occidentaux mènent une guerre de terreur contre les populations du camp adverse. Et le fait que le Kremlin le fasse au nom d’une Grande Russie mythifiée, tandis que le camp de l’Otan et de l’État ukrainien prétend représenter la démocratie et le droit des peuples, n’y change absolument rien.
L’un et l’autre font également la guerre à leur propre population. Et cela de mille et une façons. Dans une allocution récente, le président ukrainien, Zelensky, a voulu se présenter comme plus ou moins opposé à la nouvelle mobilisation d’un demi-million d’hommes, sur fond de lassitude croissante de la population face à une guerre qui n’en finit pas. Il est allé jusqu’à dire qu’il comprenait qu’elle suscite de la lassitude « en soirée », mais que, « au matin », il faut se reprendre et y aller. La chose la plus claire est qu’il aimerait dégager sa responsabilité d’une mobilisation qu’il sait impopulaire, pas de la guerre elle-même. En effet, elle sert de justification, même si cela passe de moins en moins bien, aux sacrifices imposés à la population et au pouvoir qu’exercent Zelensky et les siens.
Évidemment, quand ceux-ci s’adressent à leurs parrains internationaux, ils ne s’embarrassent pas d’autant de précautions oratoires. Ainsi, au récent Forum économique de Davos, qui réunit chaque année en Suisse le gratin du monde des affaires et des chefs des grandes puissances, le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Dmytro Kuleba, n’y est pas allé par quatre chemins. S’exprimant sur Bloomberg TV, le chef de la diplomatie ukrainienne a déclaré aux dirigeants américains et européens avec cynisme : « Nous vous proposons la meilleure offre au monde : vous ne sacrifiez pas vos soldats, vous nous donnez des armes et de l’argent, et nous finirons le travail. »
En clair, nous fournirons notre propre peuple comme chair à canon pour votre politique. « On croit mourir pour la patrie, on meurt pour des industriels » disait Anatole France en 1922 dans L’Humanité en faisant le bilan de la Première Guerre mondiale : en français, en ukrainien, en russe ou en anglais, le constat n’a pas pris une ride.