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- Lutte ouvrière n°2878
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Dans le monde
Iran : un régime qui tient par la terreur
Malgré l’encadrement policier déployé dans de nombreuses villes du pays, malgré des arrestations préventives massives, des milliers de jeunes Iraniens ont tenu à marquer, samedi 17 septembre, l’anniversaire de la mort de Mahsa Amini tuée par la police des mœurs iranienne.
Beaucoup se sont rassemblés, sur les toits ou dans la rue, pour crier « Mort au dictateur ». Certains ont tagué ou incendié des bâtiments officiels. D’autres ont tiré sur des miliciens bassidjis, tuant l’un d’eux. Dans le Kurdistan iranien, région d’origine de Mahsa où l’opposition au régime a toujours été la plus forte, les troupes des Gardiens de la révolution avaient occupé les rues pour empêcher tout rassemblement.
La fébrilité du régime montre qu’il redoute toujours que la révolte redémarre. Pour y faire face, les députés ont augmenté dans le budget 2023-2024 la part allouée aux appareils de sécurité comme aux institutions religieuses et de propagande. La répression a été terrible, avec 500 personnes tuées par la police, plus de 22 000 arrêtées, tabassées, torturées, dont beaucoup de très jeunes qui refusent de se soumettre, plusieurs dizaines de condamnés à mort, dont certains exécutés publiquement pour frapper les esprits. Mais si elle a stoppé la contestation, elle a aussi attisé la haine contre le régime.
Malgré les amendes, les licenciements, les fermetures administratives de magasins ou de cafés, les arrestations pour « outrage aux mœurs » ou « troubles psychiatriques », les humiliations policières, des milliers de femmes, surtout dans les milieux urbains et intellectuels, refusent de se voiler en public. Elles trouvent du soutien dans la rue et le métro, auprès de femmes et d’hommes. Des jeunes continuent de s’en prendre aux mollahs dans les rues en faisant tomber leurs turbans.
Pour les classes populaires iraniennes, la vie quotidienne reste marquée par une inflation qui dépasse les 50 % et des bas salaires qui imposent de cumuler plusieurs emplois pour vivre. Les pénuries de multiples produits, provoquées par l’embargo américain mais aussi par la spéculation et tous les trafics des mafias liées au pouvoir, aggravent les difficultés. Cet été, face aux épisodes de canicule et sans doute pour faire mine de se préoccuper du sort de la population, le régime a décrété plusieurs jours fériés. Mais le travail ne s’est arrêté ni dans les usines privées ni dans les installations pétrolières, où la chaleur est extrême. Dans de nombreuses entreprises, les travailleurs doivent sans cesse faire grève pour recevoir leurs salaires ou des primes dues.
Alors que le régime des mollahs perd de plus en plus de soutien à l’intérieur du pays, il essaie d’accumuler des succès politiques et diplomatiques à l’extérieur. Les dirigeants iraniens profitent ainsi de la résistance des pays qui refusent de se soumettre aux injonctions des États-Unis de se ranger derrière eux face à la Russie ou la Chine. Fin août, ils ont rejoint les pays des BRICS, invités par l’Afrique du Sud. Ils peuvent contourner l’embargo américain en livrant leur pétrole à la Chine ou en servant d’intermédiaires dans le commerce vers la Russie, sans que pour autant cela profite à la population. En mars, ils s’étaient réconciliés avec l’Arabie saoudite, l’une des puissances régionales rivales.
Pour les uns comme pour les autres, et y compris pour les dirigeants occidentaux, les droits des femmes ne pèsent pas lourd.