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Grande-Bretagne : écoles en danger
À quelques jours à peine de la rentrée, 147 écoles anglaises ont été prévenues par le gouvernement qu’elles ne pourraient pas ouvrir normalement, leurs murs menaçant de s’écrouler.
Ces écoles ont en commun d’avoir été construites en béton autoclavé armé (en anglais : RAAC), un matériau poreux qui s’effrite au bout de trente ans, voire plus tôt. Utilisé des années 1950 aux années 1990, le RAAC avait été choisi pour son coût modeste, assurant pendant des décennies des marges confortables aux entreprises de BTP à qui l’État confiait les travaux, sous la gauche comme sous la droite.
Les insuffisances du RAAC sont connues depuis les années 1990 et un toit s’était déjà effondré en 2018. Le syndicat des enseignants, le NEU, réclame depuis des mois la liste des bâtiments scolaires contenant ce type de béton. C’est pourtant sur les épaules des enseignants et des parents d’élèves des écoles concernées qu’est retombée, in extremis, la charge de gérer une rentrée sans locaux ou presque ! De quoi être révolté, car cela peut signifier le retour aux cours en ligne subis pendant le confinement, ou encore la suppression de la cantine pour des enfants à qui elle procure le seul repas équilibré de la journée, entre autres difficultés.
Le Premier ministre conservateur Rishi Sunak, depuis l’Inde où il participait au sommet du G20, s’est défendu de toute responsabilité. Comme le RAAC, il ne manque pas d’air ! Certes, le problème ne date pas d’hier. Mais Sunak a participé tout à fait personnellement, en tant que ministre des Finances de Boris Johnson de 2020 à 2022, aux coupes dans les budgets publics qui ont gelé la réfection des écoles, dans la continuité des mesures d’austérité des conservateurs Cameron et May dans les années 2010.
Quant aux travaillistes, dans la perspective des élections législatives prévues fin 2024, ils tirent à boulets rouges sur Sunak et son parti. Mais c’est pour mieux faire oublier que les investissements réalisés dans l’éducation sous le travailliste Tony Blair, à la fin des années 1990, l’ont été sous la forme de « partenariats public-privé », où les coûts revenaient à la collectivité et les bénéfices aux grands actionnaires, sans permettre, loin s’en faut, l’amélioration à grande échelle de la qualité des bâtiments. Or, dans ceux qui contiennent du RAAC, quand ce béton se désagrège, il ne protège plus de l’amiante – presque toujours présent – ce qui constitue un risque sanitaire supplémentaire, lui aussi négligé par les pouvoirs publics.
Le scandale du RAAC éclatant enfin au grand jour, on redécouvre qu’il a été aussi utilisé pour construire des logements sociaux, des hôpitaux, des prisons, des tribunaux... Pourquoi ces milliers de bâtiments-là ne sont-ils pas évacués eux aussi en urgence ? Sunak ne semble pas pressé de dévoiler la liste, à supposer qu’il l’ait. Mais on sait déjà que, si de grands travaux sont finalement lancés, les prestataires seront choisis parmi les « quarante voleurs » habituels, à savoir les grands groupes déjà arrosés de contrats pendant la pandémie.
Entre recherche du profit à court terme, quel que soit l’impact sur la collectivité, et complaisance d’un État jamais regardant quand il s’agit de servir le grand patronat, cette affaire offre un concentré des méfaits de ce système capitaliste... au bord de l’écroulement.