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Mayotte : l’opération anti-pauvres s’intensifie
Lundi 19 juin, à Mayotte, 80 gendarmes ont cerné le site de Barakani dans la commune de Koungou, avant que les bulldozers entreprennent la destruction de 80 cases. Fin mai, c’était 162 cases dans un autre quartier de la même ville, Talus 2, que la préfecture avait fait détruire.
À Barakani, la destruction est intervenue après que la justice eut rejeté le recours d’une famille de neuf personnes à qui la préfecture avait proposé un relogement temporaire dans 50 m2 ! Ce n’est pas un hasard si personne de Barakani, en situation régulière ou pas, n’a été relogé. Devant un tel mépris, les expulsés démontent les cases, récupèrent les matériaux, qui valent cher, et reconstruisent quelque chose d’autre ailleurs dans l’île.
Depuis le 17 mai, les expulsions vers les Comores ont repris, et les personnes expulsées sont de plus en plus nombreuses, 150 certains jours. Le président des Comores, Azali, qui avait dit qu’il ne tolérerait que le retour de volontaires, s’est de toute évidence incliné devant les pressions de la France, suscitant aux Comores indignation et protestations.
Wuambushu est une grossière opération de diversion. Alors qu’il y a déjà des coupures d’eau quatre nuits par semaine de 17 h à 7 h, la préfecture a annoncé qu’il y en aura jusqu’à six en août. La préfecture fait passer l’idée que, s’il n’y pas assez d’eau, c’est parce qu’il y a trop de Comoriens. Mais les Mahorais ou les Comoriens chassés de chez eux ne sont pour rien dans les infrastructures sous-dimensionnées. Au total, les usines de fourniture d’eau n’arrivent à délivrer que 38 000 m³ par jour, alors qu’il en faudrait 42 000.
C’est le même message que les politiciens font passer dans le secteur de la santé. Ainsi, la chambre régionale des comptes indiquait le 20 juin que 40 % des centres de la protection maternelle et infantile (PMI) ont été supprimés en quinze ans, alors que depuis 2012 la population a augmenté probablement de 40 %.
Avec pour résultat un taux important de malnutrition des enfants, des IVG médicamenteuses et des consultations obligatoires de femmes enceintes non réalisées. Le conseil départemental de Mayotte, en charge de la PMI, se défausse sur l’État, qui en a effectivement bloqué le financement, au niveau de celui de 2015.
Pour toute réponse, la responsable au département qui en a la charge a affirmé que, « si nous n’accueillions que des Français, notre budget suffirait largement » et menace de ne plus accueillir, à partir du 1er juillet, les « non assurés sociaux », c’est-à-dire les femmes et enfants qui ne sont pas en situation régulière, en les renvoyant sur les structures hospitalières qui sont déjà débordées. À Mayotte, l’État et les politiciens locaux s’entendent pour faire monter la haine.