Pétroliers fantômes : marché noir pour l’or noir07/06/20232023Journal/medias/journalnumero/images/2023/06/2862.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Pétroliers fantômes : marché noir pour l’or noir

Le 2 mai un pétrolier prenait feu à l’entrée du détroit de Singapour. Trois marins y ont laissé la vie. C’était un navire mystérieux, qui avait changé quatre fois de pavillon, de nom et de propriétaire ces deux dernières années.

Vieux, mal entretenu, pas assuré, ce navire avait chargé du pétrole en Chine et attendait une destination.

C’était l’un des pétroliers fantômes qui assurent de par le monde le transport de l’or noir extrait des pays sous embargo. C’est le cas de l’Iran et du Venezuela depuis des années, de la Russie depuis le début de la guerre en Ukraine. Car, embargo ou pas, leur pétrole s’achète et se vend. Il faut seulement en dissimuler l’origine, soit en le faisant transiter et éventuellement transformer par un pays tiers, soit en le transbordant en pleine mer, d’un bateau à l’autre. Des petits pétroliers venant par exemple des ports russes de la Baltique jusqu’à Gibraltar transfèrent ainsi leur cargaison dans des grands pétroliers à destination de l’Asie. La manœuvre est si connue et si visible que le gouvernement espagnol craint un accident et une marée noire.

L’AIS, le service électronique obligatoire qui donne la position, le cap, la vitesse, etc. de tous les navires de commerce, signale de nombreuses coupures de signal sur les pétroliers, indiquant des opérations clandestines. Les services portuaires voient passer des cargaisons de provenance inconnue, mais qui sont tout de même débarquées. Ce ne sont pas de petites quantités puisque, de l’aveu du ministre espagnol, ce sont ces livraisons qui ont permis la baisse du prix de l’essence en Espagne.

L’Union européenne parle désormais d’interdire l’entrée de ses ports aux pétroliers clandestins, détrompant ceux qui croyaient que l’Europe dite démocratique ne connaissait plus les bateaux fantômes. Mais on ne trafique pas par pétroliers entiers comme on le fait pour quelques litres d’eau-de-vie et les États modernes sont parfaitement à même de savoir tout ce qui se passe en haute mer. En fait, la circulation clandestine de pétrole ne les dérange absolument pas puisque seuls des marins sans papiers y risquent leur peau et des armateurs véreux leurs navires. Et si tout cela finit par des marées noires, c’est « après eux le déluge ».

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