Casino : un requin en eaux troubles07/06/20232023Journal/medias/journalnumero/images/2023/06/2862.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Casino : un requin en eaux troubles

Jeudi 1er juin, Jean-Charles Naouri, premier actionnaire et PDG du groupe Casino (Monoprix, Franprix, Leader Price, etc.), a été mis en garde à vue.

L’audition de Jean-Charles Naouri par la brigade financière découle d’une enquête ouverte depuis 2020, après un signalement en 2016 par l’Autorité des marchés financiers. Naouri fait l’objet d’une enquête pour manipulation de cours en bande organisée, corruption privée active et passive et délit d’initié, par le Parquet national financier (PNF). Durant leur grève, les travailleuses de Vertbaudet ont, elles, eu droit aux CRS, à l’huissier et au tribunal, suscitant bien moins d’émotion chez les journalistes. Comme toujours, la justice n’est pas la même selon qu’on est patron ou ouvrier.

L’enquête porte sur les relations entre Jean-Charles Naouri et Nicolas Miguet, propriétaire de journaux et de sites boursiers. Déjà condamné pour des faits de manipulation de cours en Bourse, Miguet aurait été payé 20 000 à 30 000 euros par mois pour recommander l’achat d’actions Casino dans son hebdomadaire Bourse plus, la lettre La Bourse ou le site Bourse. La valeur de l’action Casino est en effet d’autant plus vitale pour Naouri que, plus le cours de Casino baisse, plus il doit gager d’actions pour faire face à la dette de 6,4 milliards d’euros de son groupe et le maintenir à flot.

Dans cette affaire fructueuse, une kyrielle de gros poissons de la distribution et de la finance sont intéressés. D’un côté, on trouve Jean-Charles Naouri et ses amis – avocats, banquiers d’affaires et officines financières ayant pignon sur rue – à l’origine de l’empire Casino depuis les années 1990. Ceux-là ont, pour l’heure, intérêt à la survie du groupe, bâti sur le modèle des sociétés en cascade qui ont fait la fortune de Bernard Arnault ou Vincent Bolloré. De l’autre, ou du même côté selon les revirements des alliances entre requins, il y a ceux qui lorgnent sur les profits escomptés de la chute de Casino ! C’est apparemment le cas du fonds spéculatif Muddy Waters, qui parie sur la baisse accélérée des cours d’un groupe comme Casino, pour mieux mettre le grappin dessus.

Cette situation attise les convoitises de la grande distribution, qui recueille actuellement des bénéfices record grâce au vol généralisé des classes populaires par l’inflation. Dans cet aquarium, tous utilisent les mêmes ficelles, plus ou moins légales. D’ailleurs, le lendemain de la garde à vue de Naouri, après la chute de l’action Casino à son niveau historique le plus bas, le patron d’Intermarché a proposé de racheter 100 supermarchés et hypermarchés Casino.

Ce ne sont pas moins de 50 000 travailleurs en France et 200 000 dans le monde entier qui font actuellement la richesse de Casino, sous diverses enseignes. Alors, quoi qu’il soit des déboires judiciaires et surtout financiers de Casino, les travailleurs n’ont pas à payer les pots cassés de cette guerre entre requins.

Partager