Saint-Brévin : l’extrême droite en campagne16/05/20232023Journal/medias/journalnumero/images/2023/05/2859.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Saint-Brévin : l’extrême droite en campagne

La démission mercredi 10 mai de Yannick Morez, maire divers droite de Saint-Brévin-les-Pins, en Loire-Atlantique, suscite une émotion car elle est ressentie comme un succès de l’extrême droite.

Cette démission fait suite à toute une campagne menée par une fraction de l’extrême droite contre l’installation dans la commune d’un centre d’accueil pour demandeurs d’asile (Cada). Des partisans de Zemmour et d’autres représentants des courants les plus activistes de l’extrême droite ont fait de l’installation des Cada, dont la localisation est décidée par l’État sous réserve de l’accord de la municipalité, un cheval de bataille depuis plusieurs mois. En janvier déjà, la municipalité de Callac, dans les Côtes-d’Armor, avait abandonné un projet d’accueil de réfugiés sous leur pression. La municipalité de Bélâbre, dans l’Indre, est, elle aussi, le théâtre de manifestations.

À Saint-Brévin-les-Pins, où le Cada est établi depuis 2016, l’extrême droite n’a jamais réussi à mobiliser beaucoup de monde, et même moins que les partisans du Cada. En revanche, des adeptes de l’Action française, de Civitas, des gros bras classés à l’ultradroite de toute la région, voire de toute la France, ont convergé vers cette ville. Il y a eu des courriers anonymes et des menaces de mort, l’apogée de cette campagne étant l’incendie criminel au domicile de Yannick Morez le 22 mars, ce qui n’a pas empêché la préfecture d’autoriser une nouvelle manifestation d’extrême droite le 29 avril. Ces agissements se sont succédé pendant trois mois sans réaction notable ni du préfet ni du gouvernement.

Depuis la démission de Yannick Morez, Macron a condamné des « attaques indignes », et la Première ministre Élisabeth Borne devait le recevoir à Matignon mercredi 17 mai. Maintenant qu’il a démissionné, l’ex-maire n’a jamais reçu autant de messages de soutien. Même Le Pen et Zemmour se sont démarqués des actes criminels, maintenant qu’ils sont sur la place publique. Mais qui encourage les petites frappes d’extrême droite ou les fous de Dieu se croyant en croisade sinon le gouvernement lui-même ? Lors d’une de ses dernières interventions télévisées, Macron a entonné pour la énième fois le refrain contre l’immigration. À Mayotte, à des milliers de kilomètres de Saint-Brévin-les-Pins, Darmanin a mis en scène une chasse aux pauvres et aux migrants pour la montrer à tout le pays. Et puis, combien sont-ils parmi les troupes de la police ou de la gendarmerie, parmi les hauts fonctionnaires, notamment parmi le corps préfectoral, à être gangrenés peu ou prou par les préjugés anti-migrants, voire par le racisme, et à montrer de la bienveillance pour les violences quand elles viennent de l’extrême droite ? Il n’y a qu’à regarder où sont allés les voix des policiers et gendarmes aux dernières élections présidentielles pour comprendre qu’aucune protection ne viendra de ce côté.

Élisabeth Borne a parlé des violences faites aux élus à propos du maire de Saint-Brévin-les-Pins et préparerait des dispositions pour mieux les défendre. C’est aussi une façon de minimiser la violence d’extrême droite et lui montrer bien de l’indulgence. Cette violence vise les migrants et les immigrés en général car, derrière les maires prêts à accueillir des Cada, ce sont eux qui sont visés. Demain, elle pourrait menacer toute la classe ouvrière, dont migrants et réfugiés avec ou sans papiers font partie, si l’extrême droite s’enhardissait au point d’être considérée par le patronat comme un recours pour le maintien de l’ordre. Pour se défendre, les travailleurs français et immigrés, côte à côte, ne pourront compter que sur leurs capacités à s’organiser, certainement pas sur le gouvernement et ses troupes de répression.

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