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- Lutte ouvrière n°2853
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Darmanin parle d’ultragauche pour draguer à droite
Dans un interview au JDD du 2 avril, Gérald Darmanin s’en est pris à ce qu’il nomme l’ultragauche. Il a confirmé la demande de dissolution de deux groupes écologistes, promis qu’en France il n’y aura plus aucune ZAD et dénoncé le « terrorisme intellectuel » d’une partie de la gauche parlementaire. Rien de moins !
Diverses organisations, dont la Ligue des droits de l’homme, ayant dénoncé les moyens quasi militaires utilisés contre les opposants à la mégabassine de Sainte-Soline, et le gouvernement étant toujours confronté à la contestation de sa réforme des retraites, le ministre de l’Intérieur voudrait ouvrir un contre-feu et se poser en gardien de l’ordre.
L’ultragauche dont parle Darmanin n’existe que dans sa tête. Il dénonce 2 200 militants radicaux fichés S par ses services. Mais, comme l’ont écrit les parents de Serge D., entre la vie et la mort après avoir reçu une grenade dans la tête, « des milliers de militants dans la France d’aujourd’hui sont fichés S ». Il suffit pour cela « de se battre contre l’ordre établi », d’avoir été arrêté lors des manifestations des gilets jaunes, voire d’avoir brûlé des poubelles lors des manifestations interdites après le recours au 49-3.
En prétendant interdire les ZAD (Zones à défendre), Darmanin se pose en rempart de la propriété privée et veut criminaliser ceux qui s’opposent à la construction de tel ou tel projet, barrage, autoroute ou stockage de déchets radioactifs. Les Soulèvements de la terre, menacés de dissolution, sont un regroupement de collectifs qui luttent contre l’accaparement des terres agricoles pour la construction d’infrastructures ou de projets industriels. Le gouvernement est à plat ventre devant les planteurs ou les industriels empoisonneurs au chlordécone ou aux perfluorés, mais il réprime ceux qui protestent.
Les lois répressives successives votées depuis quinze ans, dont la loi contre le séparatisme, donnent des outils juridiques au pouvoir pour réprimer et dissoudre de telles organisations. Ces lois, qui visent aujourd’hui des militants écologistes, pourront être appliquées contre tous les militants politiques et syndicaux ou même des travailleurs en lutte.
En traitant de « terroristes intellectuels » tous ceux qui dénoncent les violences policières et cette criminalisation de l’action militante, y compris certains députés de la Nupes, Darmanin prend une posture. Il s’adresse à tous les possédants, agriculteurs, commerçants, petits et moyens patrons, inquiets pour leurs affaires. Il fait des œillades aux électeurs de droite et d’extrême droite, partisans de l’ordre et soutiens indéfectible de la police. Il cherche à rassembler ce camp réactionnaire derrière un Macron sans majorité.
À l’inverse, Darmanin pourrait dresser contre lui, bien au-delà des militants écologistes radicaux, tous ceux, dans la jeunesse et surtout parmi les travailleurs, qui refusent de subir des attaques contre leurs conditions d’existence et découvrent le véritable rôle de l’État et de sa police.