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Dans le monde
Armement : au bonheur des marchands de mort
« L’invasion (de l’Ukraine) a vraiment provoqué une envolée significative de la demande d’armes en Europe, qui (…) va selon toute vraisemblance mener à de nouvelles hausses d’importations. »
Voilà ce que constate le dernier rapport du Sipri, l’Institut international de recherche sur la paix ( ! ) de Stockholm, seul organisme public au monde à publier des chiffres et données fiables dans le domaine des armes.
Sur les cinq dernières années, dit-il, les seuls transferts d’armes ont quasiment doublé en Europe, dépassant largement 100 milliards de dollars en valeur annuelle. L’an dernier, le Sipri notait déjà que, malgré la baisse d’activité mondiale due au Covid, ce secteur ne connaissait pas la crise. Depuis, sa progression a littéralement explosé avec la guerre en Ukraine.
Les transferts d’armes en Europe ont presque doublé en cinq ans. L’Ukraine, qui comptait jusqu’alors pour quantité négligeable dans ce domaine, est devenue en 2022 le troisième importateur mondial d’armement, s’en procurant massivement auprès des États-Unis et, à un degré moindre, des pays européens. Mais tous les pays membres de l’OTAN en Europe ont aussi augmenté leurs importations d’armes, en moyenne de 65 % pour l’année écoulée.
Les États-Unis sont le pays dont les industriels ont le plus profité de cette situation. Leur poids militaire, leur puissance industrielle et leur capacité à offrir de substantiels crédits leur ont permis d’accroître fortement leur part de ce marché. De 30 % sur la période 2013-2017 elle est passée actuellement à 40 %.
La Russie occupe depuis longtemps la seconde place sur le podium de cette sinistre compétition car, derrière ces données commerciales, il faut rappeler ce qu’elles recouvrent : en trois décennies, 2,7 millions d’êtres humains ont péri dans des conflits armés, donc armés par les marchands de mort.
Avec 16 % de ce marché, la Russie recule. Il lui faut restreindre ses exportations car elle « consomme » une bonne part de sa production militaire sur les champs de bataille d’Ukraine. Les sanctions occidentales l’empêchent aussi de se procurer des microprocesseurs et autres composants indispensables aux systèmes d’armement sophistiqués.
Le troisième larron du trio de tête des marchands d’armes est la France. Malgré le fait que certains armements français ne sont pas compatibles avec les standards que les États-Unis ont généralisés au sein de l’OTAN, ce qui rend difficile de les vendre aux membres de cette alliance, la France ne cesse de gagner des parts du marché des armes. Au point qu’avec 11 % du total mondial, elle talonne désormais la Russie et distance largement ses concurrents allemand, italien, britannique ou chinois.
Certains diront, pour s’en féliciter, que cela rééquilibre la balance commerciale de la France, mais en omettant un « détail » : de combien de morts se paiera ce qui remplit les bilans de l’industrie d’armement et les poches de ses actionnaires ?