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Dans les entreprises
La Redoute Roubaix Wattrelos : une campagne jusqu’à la nausée
Ces derniers jours, tous les médias se sont emparés « des 100 000 euros qu’ont touchés certains salariés de La Redoute pour une mise de 100 euros ». Cela a été l’occasion d’une campagne générale sur « le capitalisme qui pourrait aussi enrichir les salariés », qu’il fallait « faire confiance aux actionnaires », bref que « le capitalisme avait du bon ».
La réalité est assez différente. En 2014, les travailleurs de La Redoute s’étaient mobilisés collectivement pendant des mois pour imposer au capitaliste Pinault, le propriétaire de l’époque, qui voulait liquider l’entreprise, de ne laisser personne sur le carreau.
Certes, les travailleurs mobilisés n’avaient pas réussi à empêcher le départ de 1 200 travailleurs, mais ils avaient réussi à imposer à Pinault qu’il provisionne un fonds bloqué de 180 millions, permettant à des centaines de travailleurs de partir en préretraite ou de toucher des sommes allant jusqu’à 80 000 euros (primes légale et extra-légale).
Et Pinault, qui n’avait pas trouvé de repreneur à l’époque, avait décidé de céder La Redoute pour un euro symbolique à deux cadres dirigeants, Balla et Courteille, en dotant l’entreprise de 320 millions de fonds. C’est à ce moment-là, en 2015, que ces deux cadres dirigeants ont proposé un fonds commun de placement aux salariés. Mais tout le monde n’était pas logé à la même enseigne. Les salariés de base pouvaient investir jusqu’à 160 euros, 50 hauts cadres beaucoup plus et les deux dirigeants encore plus.
Si La Redoute a vu sa valeur remonter et a pu être revendue à 100 % à la famille Moulin-Houzé, 31ème fortune de France, c’est grâce au travail de ses salariés, entre autres pendant le Covid, où les travailleurs n’ont quasiment pas arrêté pendant cette explosion des commandes par Internet.
Cette vente a été finalisée il y a quelques mois. Résultat des courses : autour d’un milliard d’euros ont été partagés tout à fait injustement. Les deux dirigeants auraient touché autour 250 millions d’euros chacun. 50 hauts cadres entre 5 et 10 millions d’euros chacun. Et 1 500 salariés, dont beaucoup ont quitté La Redoute, qui avaient misé une centaine d’euros en moyenne, ont touché autour de 100 000 euros chacun.
Quant aux travailleurs qui n’avaient pas pris de part et qui ont contribué à créer cette richesse, leurs salaires sont bloqués ; des ouvrières gagnent le smic après 35 ans d’ancienneté. Les départs en retraite ne sont pas remplacés, et avec la charge du travail qui augmente, le nombre de maladies professionnelles et de licenciements pour inaptitude explosent. Aux salariés de La Redoute interviewés après l’annonce des 100 000 euros et qui décrivaient l’envers du décor, les journalistes répondaient que ce n’était pas le sujet. Eh bien si, justement.
Un des objectifs des attaques du gouvernement est d’ouvrir le magot des retraites à des fonds de pension, et il utilise l’exemple de La Redoute pour se tourner vers des retraites par capitalisation. Le gouvernement utilise l’opération financière de La Redoute pour expliquer que c’est forcément gagnant.
Quand on joue au Loto, il est rare qu’on gagne ! Au contraire. D’ailleurs, un certain nombre de travailleurs de La Redoute n’avaient pas voulu placer d’argent en 2014, car beaucoup se souvenaient que, dans les années 1990, Pinault avait proposé des actions aux salariés et que, quelques années plus tard, ils avaient perdu de l’argent.
Pour augmenter les salaires, les travailleurs de La Redoute et d’ailleurs ne peuvent compter que sur leurs luttes.