Burkina Faso : l’impérialisme français en échec25/01/20232023Journal/medias/journalnumero/images/2023/01/2843.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Burkina Faso : l’impérialisme français en échec

Après le Mali, les troupes françaises vont devoir quitter le Burkina Faso. Les autorités burkinabées demandent aux 400 militaires stationnés à Ouagadougou, la capitale, de partir dans un délai d’un mois et dénoncent, par la même occasion, les accords militaires qui liaient la France au Burkina.

Cette décision était attendue depuis la prise du pouvoir le 30 septembre dernier par le capitaine Ibrahim Traoré. Son coup d’État s’était accompagné de manifestations contre l’impérialisme français. Des enseignes du trust Bolloré et des stations-service Total avaient été saccagées et des manifestants avaient tenté d’incendier l’ambassade de France et des centres culturels. La junte actuellement au pouvoir n’avait eu qu’à surfer sur cette hostilité de la population envers l’ancien colonisateur, dans un scénario en tout point semblable à ce qui s’était déroulé au Mali un an et demi auparavant.

Les Burkinabés ont mille raisons d’en vouloir à l’impérialisme français et de souhaiter se débarrasser de sa présence. Pendant vingt-sept ans, Paris a maintenu à la tête du Burkina l’un des pires dictateurs qu’ait connu l’Afrique, Blaise Compaoré. Cet homme de main des gouvernants français a pillé la population et fait régner la terreur, ne reculant pas devant la torture et l’assassinat, à commencer en 1987 par celui de son prédécesseur, Thomas Sankara, dont la volonté d’indépendance déplaisait aux dirigeants français. Lorsque Compaoré fut renversé en 2014 par un puissant mouvement populaire contre la corruption et la vie chère, c’est l’armée française qui le sauva en l’évacuant vers la Côte d’Ivoire, où cet autre ami de la France qu’est Alassane Ouattara lui organisa un refuge doré et lui accorda la nationalité ivoirienne, le mettant à l’abri d’une éventuelle extradition. Dans le même temps, la diplomatie française organisait une transition sur mesure, pour mettre en place au Burkina un nouveau régime allié de la France, tout aussi corrompu et prédateur que celui de Compaoré.

Lorsque les premiers attentats djihadistes frappèrent le pays en 2016, les hommes des forces spéciales françaises y installèrent leur camp. Ils n’ont depuis offert aucune protection à la population, qui doit aujourd’hui affronter une situation dramatique. La moitié du territoire est tombée de fait aux mains des bandes djihadistes. La population se retrouve prise en étau entre ces groupes armés et les supplétifs de l’armée burkinabée, les « volontaires de la patrie », qui poursuivent leurs propres objectifs contre la population peule. Deux millions de personnes, dont une bonne proportion d’enfants, ont dû fuir leurs villages. Chacun a pu constater que la présence des troupes françaises avait pour seul objectif de défendre les intérêts de l’impérialisme, et les signes d’hostilité se sont succédé, du blocage de convois chargés d’évacuer les militaires français du Mali aux manifestations antifrançaises de ces derniers jours.

Aujourd’hui, la junte et son chef, Ibrahim Traoré, s’appuient sur cette contestation ô combien justifiée de la présence française. Il s’agit certes d’un dictateur, d’un ennemi mortel des travailleurs, mais ni plus ni moins que ceux qu’a soutenus la France. Quant à celle-ci, elle récolte le fruit de dizaines d’années de prédation et voit son ancien pré carré colonial se réduire comme peau de chagrin.

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