SCAF : défense nationale, défense du capital07/12/20222022Journal/medias/journalnumero/images/2022/12/2836.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

SCAF : défense nationale, défense du capital

Le PDG de Dassault Aviation, Éric Trappier, a annoncé le 2 décembre un accord industriel avec Airbus pour le futur avion de combat européen, le SCAF.

La semaine précédente, Trappier avait qualifié de « pseudo accord » la déclaration politique des gouvernements allemand et français. « Avant l’heure, ce n’est pas tout à fait l’heure », affirmait-il, soulignant ainsi que les politiques peuvent bien faire des annonces, ce sont les capitalistes, en l’occurrence la famille Dassault, qui font leurs comptes et finalement décident en fonction de leurs intérêts.

Depuis le début, les tractations pour la répartition des tâches font l’objet de marchandages : il y a en effet au moins cent milliards à se partager dans les décennies à venir, si cet avion vient hélas à voler un jour. La France comme l’Allemagne défendent chacune leur intérêt national, c’est-à-dire celui de leurs propres capitalistes, et les députés du Bundestag n’entendent pas alimenter les caisses de Dassault avec autant d’empressement et de frénésie que le font depuis des décennies le gouvernement et les députés français. De son côté, Dassault se prévaut d’un savoir-faire de longue date et d’une propriété industrielle qui lui garantiraient le monopole d’une partie importante de l’avionique, et il exige de récupérer la plus grosse part possible du gâteau. Apparemment, il aurait réussi, du moins jusqu’à présent. Le programme va en effet être discuté en plusieurs étapes successives, soumises chacune au vote des Parlements nationaux.

La famille Dassault fourbit donc ses armes. Bien naturellement, le Sénat, où Serge Dassault a eu un siège de 2004 à 2017, adoptait fin novembre un amendement à la loi de finance proposant de faire payer par l’État des études « destinées à établir les conditions de faisabilité d’un projet de chasseur de nouvelle génération financé par la France en dehors de toute coopération ». C’est le fameux « plan B » de Dassault à l’ombre de l’État et des finances publiques françaises.

L’Espagne, qui s’était ralliée au projet tardivement et de façon plus marginale, n’a semble-t-il pas voix au chapitre. Les déclarations politiques des uns et des autres de chaque côté du Rhin se comprennent mieux lorsque l’on sait que l’Allemagne a laissé la maîtrise de l’avion de combat à la France en échange de celle du prochain char de combat. Celui-ci devant être également développé et construit en commun par les deux pays, on se précipite pour en profiter. Les enjeux sont multiples et jouent sur des milliards.

Les capitalistes de l’armement prospèrent d’autant plus que le son du canon se rapproche.

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