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- Lutte ouvrière n°2830
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Leur société
Contre les chômeurs : les sénateurs en rajoutent
Au moment même où l’Unédic annonce une caisse largement excédentaire, le projet de loi de Macron visant à durcir les droits des travailleurs privés d’emploi est aux mains des sénateurs.
L’excédent est en partie l’effet de la précédente réforme de l’Assurance chômage de 2019 : les allocations versées ont baissé d’environ deux milliards d’euros par an, aux dépens des chômeurs. Une autre raison est que, d’aussi loin que les salaires suivent la hausse des prix, et si mal payés que soient les emplois créés, la masse salariale a tout de même augmenté, entraînant une hausse mécanique des cotisations. Et surtout, sur les 6,5 millions d’inscrits à Pôle emploi, seuls 2,5 millions touchent une indemnité, quand 3,6 millions y auraient droit.
Cela rend d’autant plus évident le fait que la réforme voulue par le gouvernement est une ponction sur les revenus ouvriers, destinée à atterrir dans le gros sac d’aides multiformes aux « entreprises », en réalité au grand patronat. Ce projet de loi aggrave les attaques contre les travailleurs sans emploi, en prolongeant les nouvelles règles d’attribution (avoir travaillé six mois minimum sur les 24 derniers mois) et la durée de celle-ci (deux ou trois ans selon l’âge). Il prévoit aussi de moduler ces règles en fonction du marché de l’emploi : moins de chômage se traduirait pas moins de droits pour les chômeurs, comme si ces derniers devaient se sentir coupables de se retrouver sans emploi, la double peine en quelque sorte !
Accepté par la majorité des députés, le projet de loi est à présent en discussion au Sénat, où les sénateurs LR et UDI doivent à leur image de barbons conservateurs d’en rajouter une couche. Ils exigent qu’après trois refus de proposition de CDI, le travailleur sans emploi perde son indemnisation. Certains insistent même pour que cela se produise après un seul refus. Et peu importent évidemment les conditions proposées à l’embauche. Il faudrait aussi à certains une « sécurisation » de la modulation des règles en fonction de la conjoncture du marché du travail, et surtout, surtout, que l’abandon de poste n’ouvre pas droit à indemnisation. Il n’est pas question pour ces messieurs qu’un travailleur épuisé ou écœuré par ses conditions de travail s’en aille, tout simplement, et pire, qu’il puisse toucher une allocation chômage.
Quant au bonus-malus censé limiter le recours abusif des employeurs aux contrats courts, il serait, lui, adouci par les sénateurs, bien dans leur rôle. Forcés de doubler Macron et le ministre Dussopt sur leur droite, ils veulent imprimer à la nouvelle loi un « caractère désincitatif », comme ils disent. Ce faisant, en durcissant davantage l’attaque contre les chômeurs, ils risquent plutôt d’inciter l’ensemble des travailleurs à réagir collectivement.