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- Lutte ouvrière n°2827
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Dans les entreprises
PSA – Mulhouse : “Tavares est allé trop loin”
Cela fait bien longtemps que, sur le site PSA de Mulhouse, les salariés n’avaient été aussi nombreux à débrayer : 1300 sur la journée du 28 septembre.
Depuis des mois, la hausse des prix faisait parler dans les ateliers. Des militants autour de la CGT s’adressaient à leurs camarades pendant les pauses, à l’occasion de prises de parole, ou durant les transports par bus. Peu d’ouvriers, alors, croyaient que l’on réussirait à faire augmenter les salaires. Les solutions mises en avant pour les problèmes de fin de mois étaient plutôt le blocage des prix, la baisse des taxes, et recevoir de bonnes primes. Beaucoup se demandaient pourquoi s’entêter à demander des augmentations de salaire que le patron refusait depuis des années.
Mais si les travailleurs n’y croyaient pas, l’idée faisait quand même son chemin. Et, après l’annonce des 8 milliards de bénéfices du premier semestre 2022, beaucoup attendaient une prime à la hauteur... et la cerise sur le gâteau sous forme d’augmentation de salaire. Des entreprises moins riches que Stellantis en avaient bien lâché à leurs salariés.
Le 27 septembre, la réunion avec la direction sur le pouvoir d’achat a accouché d’une souris avec 1 000 euros de prime gilets jaunes, et zéro euro d’augmentation. C’était l’incompréhension, l’écœurement : « On nous prend pour des c... ». Après un rassemblement le matin, à l’initiative de la CGT, d’une centaine d’ouvriers du Montage, dont une majorité d’intérimaires qui eux touchent encore moins que 1 000 euros, une cinquantaine d’ouvriers du Ferrage ont décidé de débrayer le jour même dans l’équipe d’après-midi, bientôt rejoints par des camarades du Montage, puis de Forge/ Fonderie. Beaucoup étaient des salariés pas habitués à sortir lors des débrayages : cela faisait dire à tous que quelque chose se passait vraiment. Ils étaient une centaine à défiler dans les ateliers, et à se donner rendez-vous pour le lendemain.
Des syndicats comme FO ou la CFDT ont aussi senti qu’il se passait quelque chose, et ont rejoint la CGT. Avec un appel à la grève de plusieurs syndicats, les ouvriers pouvaient plus facilement sauter le pas. C’est ainsi que le 28, tout un milieu d’ouvriers et de professionnels déposaient leurs outils ou leurs clés, disant « Tavares est allé trop loin, il nous a craché à la gueule, tant d’efforts pour des miettes ». Même des syndicats qui refusaient d’appeler à la grève, comme la CFTC ou la CFE-CGC, ne pouvaient s’opposer à ce que leurs adhérents y participent. Les ouvriers ayant connu la grève reconductible de sept semaines en 1989 n’en croyaient pas leur yeux, et tous les autres étaient surpris de voir tant de monde.
Quand on perd tout le temps, on ne s’imagine pas gagner. Pour obtenir de véritables augmentations de salaire, il faudra être au moins aussi déterminés que ceux de 1989. Ces rassemblements, ces débrayages sont des étapes, où les travailleurs apprenent à compter les uns sur les autres pour mieux s’organiser. Pendant des années, certains ont œuvré à la division. Aujourd’hui et demain, les travailleurs dans l’usine devront construire l’unité.