Mais alors que Hugo avait été un ouragan sec – ce sont les vents qui avaient causé les dégâts –, la tempête Fiona fut surtout très pluvieuse. On a relevé en moyenne 500 mm d’eau. Et ce sont les pluies ininterrompues et diluviennes pendant plus de 16 heures qui ont causé le plus de dégâts. Ponts effondrés, routes départementales bloquées, maisons inondées par la montée des eaux… Partout, des centaines de voitures ont été submergées et emportées.

De très nombreux habitants ont été privés d’électricité mais le réseau est presque rétabli aujourd’hui. En revanche, près de 100 000 familles sont encore privées d’eau en raison de la dégradation de huit usines de production sur vingt-huit. Des captages de montagne ont été brisés par des éboulements et affaissements de terrain. Mais ce désastre ne fait que s’ajouter à celui, permanent, du manque d’eau potable dans de nombreuses régions de l’île. La tuyauterie très fragile et dégradée ne peut qu’exploser sous la pression de l’eau, même en temps normal. Le réseau est tellement pourri que la tempête a très facilement pu aggraver le problème.

Quant aux inondations qui se répètent régulièrement dans certaines zones, elles constituent un véritable scandale. Car des maisons, voire des cités entières comme à l’Aiguille-Goyave, sont construites alors que ces zones sont réputées inondables. Depuis des années, la zone de Jarry, à Baie-Mahault, et de nombreuses autres ont été gagnées sur la mer et la mangrove, et on y construit beaucoup.

Les canaux et rivières débordent en grande partie du fait de l’absence de curage, des détritus pouvant ainsi bloquer l’écoulement des eaux. Un homme est mort dans sa maison emportée par la rivière des Pères, à Basse-Terre. Ni les municipalités ni les assemblées locales ni l’État, personne ne prend en charge ces nettoyages en temps normal. Lorsque les habitants le font, il leur est dit qu’ils n’en ont pas le droit.

Si on ne peut éviter les catastrophes naturelles, on pourrait en limiter considérablement les effets par une meilleure anticipation. Voilà ce qui motive la colère d’une grande partie de la population après cette tempête.

Les dirigeants des assemblées locales sont tout fiers d’avoir pu rapidement demander à l’État la reconnaissance de catastrophe naturelle. Quelle hardiesse ! Le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer, Darmanin, se donne de l’importance en promettant cette mesure pour le milieu de la semaine, en même temps que l’arrivée de son ministre délégué à l’Outre-Mer, Jean-François Carenco. On verra alors ce dernier jouer la comédie, le front soucieux et les mots choisis, dans les zones sinistrées. Et comme d’habitude aucune mesure ne sera prise.