Macron – Uber : leur morale et la nôtre12/07/20222022Journal/medias/journalnumero/images/2022/07/2815.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Macron – Uber : leur morale et la nôtre

On sait que les gouvernements, les hommes de pouvoir, sont aux petits soins pour les intérêts, même minimes, des capitalistes. Il n’empêche que la révélation du détail de ces relations à de quoi provoquer le dégoût. Il en est ainsi des correspondances entre Macron et le patron d’Uber, entre 2013 à 2017, récupérées et publiées par un consortium international de journalistes.

Il en ressort qu’en octobre 2014, après le vote par le Parlement français d’une loi interdisant le libre accès de la multinationale Uber à la plateforme de demande de taxis, le dirigeant Uber de l’époque, Travis Kalanick, s’était entretenu secrètement avec Macron, alors ministre de l’Économie de Hollande. L’entrevue fut fructueuse, à en croire un message du premier à ses codirigeants : « On quitte Bercy....Beaucoup de boulot à venir, mais on va danser bientôt. »

Cela ne fut pas si simple. Non seulement la résistance de chauffeurs de taxi face aux méthodes de la plateforme s’est manifestée, mais le soutien de Macron n’a pu empêcher que la voracité d’Uber pour s’approprier tout le marché du transport privé trouve ses limites. En 2015, Macron passait un décret allégeant la loi à l’avantage des plateformes de VTC, grâce aux projets d’amendement préparés par les juristes d’Uber. La loi n’autorisait la conduite d’une voiture de transport privé qu’après 150 heures de formation, chose intolérable pour les dirigeants d’Uber. Macron prit la responsabilité de ramener cette obligation à sept heures. La messe était dite.

Uber, une fois débarrassé des quelques entraves que constitue le Code du travail, allait conquérir des marchés en France comme un peu partout dans le monde, et devenir milliardaire en exploitant férocement des chauffeurs prétendument indépendants.

Le système Uber fut et reste basé sur l’absence de contrat de travail et de cotisations sociales donnant droit au chômage et à la retraite. C’est le retour au travail à la tâche. La légende du chauffeur libre a fait long feu : les quelque 30 000 chauffeurs sous sa coupe en France doivent, pour arriver à en vivre, faire des journées ou des nuits de dix ou quatorze heures au volant. Uber décide des tarifs des courses, les attribue « au mérite » aux chauffeurs. Pire que celle d’un salarié, leur condition les oblige à verser à la plateforme une commission de 20 ou 25 %.

Beaucoup en ont vite pris conscience, mais la loi Travail, sous l’égide de Macron, en 2016, a rendu difficile d’exiger leur requalification comme salariés.

Heureusement, les chauffeurs, les livreurs à vélo dans les déclinaisons du genre UberEats, les travailleurs exploités par les plateformes équivalentes, se sont mobilisés pour contester ce statut et le manque à gagner qu’il entraîne. Les travailleurs indépendants sont avant tout des travailleurs, leur force ne peut reposer que sur la solidarité.

Au contraire, le profit privé engendre le vol, la dissimulation, le mensonge et le mépris des autres. C’est le monde des capitalistes et des Macron.

Les relations mises ici en évidence entre l’ex-ministre de l’Économie et un groupe de loups de la finance choquent mais n’ont rien d’une exception. Elles sont la règle.

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