Accord à gauche : nouvelle enseigne, vieilles illusions04/05/20222022Journal/medias/journalnumero/images/2022/05/2805.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Accord à gauche : nouvelle enseigne, vieilles illusions

Jean-Luc Mélenchon et La France insoumise ont rassemblé derrière eux, en vue des élections législatives de juin, le Parti socialiste et le Parti communiste français, après avoir conclu un accord avec Europe écologie Les verts (EELV).

L’Union populaire, label sous lequel Jean-Luc Mélenchon s’est présenté à l’élection présidentielle, laisse donc place désormais à la Nouvelle union populaire écologique et sociale. Mais la marchandise a un goût de déjà-vu et n’a rien d’appétissant. Bien sûr, les négociateurs qui s’usent nuit et jour à fabriquer un accord et les bonimenteurs chargés de le vendre aux électeurs évoquent un moment historique, une chance unique, et vont même jusqu’à évoquer des enjeux idéologiques. Mais enfin, en coulisse, la principale pierre d’achoppement a été le partage des circonscriptions électorales. Les garanties données par la puissance invitante, LFI, que chaque composante aura son groupe parlementaire et son autonomie financière, sont alléchantes. EELV ne compte actuellement aucun député à l’Assemblée nationale ; le PCF en a onze, en dessous des quinze nécessaires pour la formation d’un groupe parlementaire et des avantages qu’il procure. Quant au Parti socialiste et à ses 24 députés sortants, une large union électorale à gauche lui permettrait de sauver la boutique après sa débâcle à l’élection présidentielle. Pour La France insoumise, outre une augmentation du nombre de ses députés, c’est l’occasion de renforcer sa position de leader incontesté à gauche pour les autres échéances à venir.

Mais ces marchandages politiciens, assez banals somme toute avant de telles élections, s’accompagnent d’une opération politique dont l’enjeu pour les travailleurs et les classes populaires n’est pas sans conséquences : à nouveau tous les tenants de la gauche, jusqu’à une gauche dite radicale, martèlent à l’unisson que le bulletin de vote peut être un bouclier pour les travailleurs et même un glaive ; à nouveau des partis qui, de l’Union de la gauche de Mitterrand à la Gauche plurielle de Jospin ou, plus près de nous, à la gauche de Hollande, ont utilisé les suffrages des classes populaires pour servir la bourgeoisie et le patronat, sont présentés comme des amis des travailleurs. Dans le passé, le résultat a toujours été de les anesthésier et de les démoraliser.

« Mélenchon, Premier ministre », c’est-à-dire la cohabitation d’un gouvernement de gauche avec Macron, est la perspective annoncée par les signataires de l’accord. La croient-ils possible eux-mêmes ? En tout cas, ils voudraient le faire croire aux travailleurs, aux chômeurs, aux retraités, aux familles populaires pour faire le plein de voix au nom du vote utile. Une telle « alternative de gauche », même dans sa variante recyclée et rassemblée par ce vieux politicien qu’est Mélenchon, ne servira qu’à étouffer la colère et les aspirations populaires dans les urnes en faisant miroiter un avenir meilleur par la vertu du bulletin de vote. Et dans l’hypothèse la plus probable où la gauche n’aurait pas la majorité parlementaire à l’issue des élections législatives, combien d’électeurs parmi les travailleurs et dans les quartiers populaires vivraient ce résultat électoral comme une défaite, les condamnant à attendre encore cinq ans avant une nouvelle tentative ?

L’union de la gauche nouvelle version est d’abord un montage électoral pour garantir un maximum d’élus à ses composantes. Aux travailleurs elle n’offre aucune perspective réelle même au cas où elle aurait une majorité parlementaire. Pour se défendre et imposer leur droit à une vie digne, les travailleurs devront faire émerger de leurs rangs des militants de la lutte de classe et non des militants de la lutte pour les places au Parlement ou dans les salons ministériels.

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