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Leur société
Le Pen : démagogue et ennemie des travailleurs
Repartie en campagne en vue du deuxième tour de l’élection présidentielle, Marine Le Pen s’est rendue, lundi 11 avril, dans une exploitation agricole de l’Yonne pour se poser, les pieds dans la boue, en candidate de la ruralité.
« Il faut garantir aux paysans des prix respectueux de leur travail », a déclaré la candidate du Rassemblement national (RN), sans dire comment elle contraindrait la grande distribution à faire preuve d’un tel respect. Se présentant aussi comme la candidate du pouvoir d’achat, elle a promis de supprimer la TVA sur un panier de cent produits alimentaires et d’hygiène. Cette mesure s’ajoute aux précédentes promesses de baisser la TVA de 20 % à 5,5 % sur le gaz, le fioul, l’électricité et le carburant.
Pour financer ces baisses, la candidate du RN a évoqué pour la première fois « une taxe à 33 % sur les rachats d’action mis en place par les entreprises pour spéculer ». Après Hollande en 2012, Le Pen à son tour semble vouloir se lancer dans le registre : « mon ennemi, c’est la finance ». Mais les promesses n’engageant que ceux qui y croient, on a pu voir ce qu’il en était et comment le même Hollande avait su se montrer ensuite le meilleur ami des financiers. Pourquoi en serait-il différemment avec Le Pen ? Agiter une telle mesure, qui reste bien vague, lui permet de ne rien dire sur les 15 milliards d’euros de profits du pétrolier Total, obtenus en spéculant, en faisant valser les étiquettes sur les carburants et en rackettant la population. Autre diversion mise en avant, Le Pen déclare qu’« il faut s’attaquer au système de l’Union européenne sur l’électricité », ce qui permet de ne pas s’attaquer à Total et aux entreprises bien françaises qui sont directement responsables de la hausse des prix de l’énergie.
Celle qui ose se présenter comme la candidate du pouvoir d’achat ne propose que des baisses de taxes et se déclare catégoriquement opposée à une revalorisation du smic, ainsi qu’à une augmentation générale des salaires. Tout au plus Le Pen envisage-t-elle d’inciter les entreprises à concéder quelques augmentations de salaire en leur promettant des baisses de cotisations. Autrement dit, ce serait aux travailleurs eux-mêmes de se payer indirectement des augmentations de salaires, puisque cela réduirait le financement de la retraite ou de la Sécurité sociale. Cette recette n’a cessé d’être mise en œuvre par tous les gouvernements depuis des décennies et n’a servi qu’à alimenter les bénéfices d’une minorité d’actionnaires.
Loin d’être la représentante de la France des oubliés qu’elle prétend être, Le Pen est une politicienne bourgeoise, respectueuse du pouvoir du grand patronat, de ses profits et de ses volontés. Le Medef n’a pas eu besoin de beaucoup élever le ton pour que Le Pen remballe sa proposition de rétablir à 60 ans l’âge de départ à la retraite pour tous.
Si Le Pen a davantage mis l’accent durant cette campagne présidentielle sur le pouvoir d’achat, pour attirer les électeurs de milieux populaires, et si les outrances racistes de Zemmour lui ont permis d’afficher une image plus policée, elle n’a pas pour autant abandonné le fonds de commerce traditionnel de l’extrême droite, la démagogie sécuritaire, nationaliste et anti-immigrée.
Sans être encore au pouvoir, Le Pen et ses partisans rendent bien service à la bourgeoisie, en divisant les travailleurs suivant leur nationalité, leur origine ou leur religion, les dressant ainsi les uns contre les autres et diminuant leur capacité à s’unir contre ceux qui sont les vrais responsables du chômage, de la montée de la pauvreté, contre les exploiteurs du patronat.