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Port de Calais : gabegie capitaliste
Il y a deux mois, l’inauguration officielle du nouveau port de Calais, destiné aux navires assurant la liaison entre la ville et Douvres, était célébrée lors d’une fête organisée par la municipalité comme l’accomplissement du plus grand chantier européen.
Deux mois plus tard, sa première mise en service commerciale du jour était annoncée avec tambours et trompettes. Et puis patatras ! Voilà que, dès la première nuit, les travailleurs de la compagnie de ferries P&O ont usé de leur droit de retrait pour « danger grave et imminent ». En effet, les aubettes d’enregistrement ne répondent pas aux normes de sécurité : la porte de l’aubette peut rester bloquée quand il y a des bouchons de camions et, en cas de problème, d’incendie par exemple, le salarié sera coincé à l’intérieur. Comme les vastes aires de stockage de camions qui existaient précédemment ont été supprimées, cet arrêt a entraîné des embouteillages monstres sur l’autoroute et les routes nationales de la région.
De plus, une série de dysfonctionnements apparaissent depuis deux semaines, que la CGT du port a dénoncés : « Les passerelles tombent en panne, il y a des problèmes techniques de partout. Les conditions météo, avec un vent de nord, n’aident pas. Les bateaux ont de grandes difficultés pour atteindre leurs postes. »
Ces erreurs grossières et ces multiples malfaçons ne sont pas une surprise pour les travailleurs du port, qui en avaient dénoncé un certain nombre avant même sa mise en service. Ils avaient aussi dénoncé le manque d’effectifs, qui aggrave forcément les conditions de travail. La direction campant sur sa proposition dérisoire de n’embaucher en plus que 17 CDD de trois mois, le service de sécurité a mis sa menace de grève à exécution le mardi 9 novembre.
Les problèmes ont été tels que les trois compagnies de ferries, qui opèrent sur le détroit, DFDS, P&O et Irish Ferries, ont décidé de se rabattre sur les anciennes passerelles et de ne pas utiliser le nouveau port. Pour chacune des compagnies maritimes rivales, c’était un beau cadeau permettant d’augmenter le cadencement et la fluidité de son trafic transmanche, source d’énormes profits, avec la perspective de les accroître encore. Pour l’instant, ce cadeau leur file sous le nez. Cet aménagement portuaire, propriété de la région, a coûté 863 millions d’euros, financés en grande partie par l’argent public. Une structure a spécialement été créée pour assurer sa conception, sa réalisation et son entretien. Mais ce sont les grands groupes du BTP, comme Bouygues, Colas, Spie-Batignolles, qui touchent le jackpot dans le cadre d’un partenariat public-privé, qui signifie en réalité : la collectivité paie et les patrons encaissent.
« Mon profit immédiat d’abord », telle est la motivation des grands patrons. Le fonctionnement rationnel du port passe après… quitte à ce que cela se retourne contre eux.