Algérie : incendies meurtriers et incurie de l’État18/08/20212021Journal/medias/journalnumero/images/2021/08/2768.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Algérie : incendies meurtriers et incurie de l’État

De gigantesques incendies ravagent le nord de l’Algérie depuis début août. Les feux sont particulièrement meurtriers en Kabylie, à 100 kilomètres à l’est d’Alger.

Alors que le pays continue de faire face à une troisième vague très violente du Covid, une autre vague, de chaleur cette fois-ci, avec des températures dépassant souvent les 40 degrés, frappe le nord avec un bilan humain et matériel dramatique.

Les communiqués officiels parlent de 140 victimes et de dizaines de disparus ; du bétail, des champs qui constituaient le gagne-pain de plusieurs milliers de familles sont partis en fumée. Le bilan est particulièrement lourd en Kabylie où les victimes ont été le plus souvent surprises dans leur sommeil par la brutalité des feux, qu’elles croyaient éteints par la mobilisation des jeunes, mais qui ont repris, faute de présence et de contrôle de la part des pompiers qui auraient su diriger les opérations.

Comme pour le Covid, le gouvernement a étalé son incurie et son manque d’anticipation face à un phénomène pourtant récurrent, 44 000 hectares de forêt avaient déjà brûlé en 2020. Ce même gouvernement réprimait les manifestations des pompiers il y a quelques mois, refusant de répondre à leurs revendications quant aux moyens nécessaires pour leur travail et au manque d’effectifs. Il parle aujourd’hui, par la voix du ministre de l’Intérieur de « mains criminelles » et met en avant la simultanéité des feux pour le prouver. L’État tente là de faire oublier sa responsabilité dans le délabrement des services publics utiles à la population.

Le discours complotiste du gouvernement conjugué à la propagande réactionnaire sur le particularisme kabyle et sur un supposé complot contre la Kabylie ont été l’aliment d’un drame à Larba Nath Irathen, une localité particulièrement endeuillée par les feux. Un jeune volontaire, militant associatif originaire de Aïn El Defla (située dans une région arabophone), accusé à tort d’être pyromane, a été victime d’un lynchage avant d’être brûlé, après avoir été extirpé d’un véhicule de police. Un crime commis par une foule chauffée à blanc par ces différents discours et voyant dans ce jeune l’exécutant de ce complot. L’appel au calme du père de la victime a sans doute apaisé les esprits et évité que la situation s’aggrave davantage.

En soutien à la population victime des incendies, l’élan de solidarité et d’organisation se poursuit, avec des caravanes populaires venant de toutes les régions du pays, des collectes d’argent et de vivres, des médicaments, des citernes d’eau, des couvertures, et nombre d’autres initiatives comme l’accueil des sinistrés. Ce que l’État ne fait pas, la population travailleuse montre qu’elle est capable de l’organiser elle-même.

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