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- Lutte ouvrière n°2754
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Editorial
Brevets sur les vaccins : à bas la propriété privée capitaliste !
En se disant favorable à la levée du monopole sur les brevets des vaccins anti-Covid, de façon à pouvoir élargir leur production, Joe Biden a créé la surprise. Jusqu’à présent, l’administration américaine avait écarté cette possibilité, tout comme les dirigeants européens. Dans un récent vote au Parlement européen, les députés de LREM, de droite et du RN s’y étaient formellement opposés. Et voilà que le président américain prend tout le monde à contre-pied !
Macron, qui avait abandonné l’idée de transformer les vaccins en « biens communs », se trouve doublé sur sa gauche, du moins en paroles. Cela a réjoui Jean-Luc Mélenchon, Fabien Roussel du PCF et Anne Hidalgo, qui ont chaleureusement applaudi l’annonce de Biden.
L’Humanité a même écrit que Biden est prêt à « limiter l’empire et les profits des très puissants monopoles pharmaceutiques américains, pour privilégier la santé et la vie sur toute la planète ». Heureusement que le ridicule ne tue pas !
Biden est le président de la première puissance impérialiste du monde, cela en fait le représentant par excellence des intérêts de la classe capitaliste. Ce n’est certainement pas « la santé et la vie sur la planète » qui le préoccupent, ce sont les affaires de la bourgeoisie ! Si Biden avait voulu se porter au secours de l’Inde, qui est plongée dans une situation dramatique, avec 4 000 morts recensés chaque jour, et bien plus en réalité, il n’aurait pas refusé toute exportation de vaccins et de matières premières, comme il le fait depuis qu’il est arrivé au pouvoir.
L’annonce de la Maison-Blanche est tout sauf désintéressée. Son problème, qui est celui de tous les dirigeants de la planète, est de créer les conditions d’une reprise des affaires et des échanges internationaux. C’est impossible tant que la pandémie fait rage dans les autres pays et que l’on reste sous la menace de variants. C’est pourquoi les dirigeants de la planète cherchent le moyen de vacciner la population mondiale.
À côté de cela, plus d’un million et demi de femmes et d’hommes continueront de mourir chaque année de tuberculose, maladie que l’on sait pourtant guérir. Des centaines de milliers d’autres mourront de malnutrition, des conséquences des guerres engendrées par l’ordre social capitaliste, par le pillage et l’exploitation, défendus par les grands de ce monde.
Ni Biden ni aucun chef d’État ne mettra le couteau sous la gorge des multinationales pharmaceutiques. S’il y a effectivement une levée exceptionnelle de ces brevets, elle sera dûment négociée et indemnisée. C’est dire que la vaccination mondiale n’est pas pour demain.
En attendant, chaque semaine et chaque mois de retard pris dans la vaccination font des dizaines de milliers de morts supplémentaires de par le monde. Alors, que les dirigeants de gauche en soient à se féliciter de l’annonce de Biden montre qu’ils sont tombés bien bas.
Les laboratoires ont déjà fait plus que leur beurre. Pfizer va, par exemple, réaliser plus de 26 milliards de dollars dans la vente de vaccins en 2021 avec une rentabilité qui fait rêver tous les capitalistes. Il envisage même d’augmenter le prix de son vaccin !
Les labos engrangent ces superprofits parce qu’ils ont, au travers des brevets, privatisé le fruit du labeur collectif et des investissements publics. Ils se sont approprié les découvertes des chercheurs et le travail des salariés.
C’est ainsi que s’est établi et consolidé le monopole des groupes capitalistes sur tous les grands moyens de production, des grands groupes automobiles aux géants de la banque, en passant par les chaînes de distribution.
L’appropriation des vaccins jette une lumière crue sur ce qu’est le capitalisme : un système où une minorité d’actionnaires détient un pouvoir dictatorial sur nous tous. Il s’agit du fonctionnement habituel de la société.
La minorité capitaliste détient le pouvoir d’embaucher ou de licencier, le pouvoir d’ouvrir ou de fermer une usine, d’organiser le travail, les horaires, les cadences. C’est aussi un immense pouvoir sur la vie des travailleurs et de l’humanité, et c’est parfois un pouvoir de vie ou de mort.
Les politiciens, qui s’arrêtent devant la propriété privée capitaliste et le pouvoir qu’elle confère à une poignée de parasites, ne représentent pas les intérêts des travailleurs et de la population. Rien ne justifie que les travailleurs s’inclinent devant la domination de cette classe bourgeoise. Il faut qu’ils se sentent légitimes à la contester, et qu’ils réalisent qu’ils ont la force collective de la renverser, car ce sont eux qui font tout fonctionner.
Bulletins d'entreprise du 10 mai 2021