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Birmanie : la complicité de l’impérialisme
Un sommet spécial de l’Asean, l’Association des nations du Sud-Est asiatique, consacré à la situation au Myanmar (nom officiel de la Birmanie), s’est tenu le 24 avril en Indonésie en présence de l’auteur du coup d’État, le général Min Aung Hlaing.
C’était l’occasion, pour ce boucher qui a fait massacrer depuis le 1er février plus de 750 opposants, de se faire adouber par ses pairs. Il n’a pas été déçu. Le « communiqué de consensus » en cinq points se contente de réclamer la cessation de la violence au Myanmar en appelant « toutes les parties à faire preuve de retenue » et à amorcer un « dialogue constructif entre toutes les parties concernées pour rechercher une solution pacifique dans l’intérêt du peuple ». Il n’y figure aucune condamnation du coup d’État à l’origine de la répression sanglante du régime, aucune menace de sanctions, aucun appel non plus à libérer les détenus politiques que l’armée birmane tue ou torture depuis douze semaines, pas même la demande d’un quelconque calendrier d’élections.
Ce n’est à vrai dire pas surprenant de la part d’une association qui compte en son sein de nombreux dictateurs, eux-mêmes parvenus au pouvoir par les mêmes moyens, comme Prayut Chan-o-cha, militaire et Premier ministre thaïlandais au pouvoir depuis son coup d’État de 2014. Mais cette opération de légitimation correspond aussi aux intérêts des grandes puissances impérialistes. Un article paru le 9 avril dans la revue américaine de relations internationales Foreign Affairs, qui fait référence dans les milieux impérialistes, l’explique de manière crue.
Son auteur, Bilahari Kausikan, universitaire et ancien diplomate de Singapour, explique : « La Tatmadaw [l’armée birmane] est brutale. Elle aurait tué des centaines de personnes lors des manifestations actuelles. Mais les gouvernements occidentaux doivent comprendre que l’armée est indispensable. […] si [ils] adoptent une approche agressive à l’égard de la Tatmadaw, ils risquent de perdre le soutien de partenaires clés, renforçant la détermination obstinée de l’armée et provoquant plus d’effusion de sang et d’instabilité dans la région. […] Si la Tatmadaw se divise ou est rendue inefficace, le pays se fragmentera probablement. L’instabilité se répandra au-delà de ses frontières. L’Irak, la Libye et la Syrie sont des exemples qui donnent à réfléchir de ce qui pourrait arriver au Myanmar et en Asie du Sud-Est sans la force stabilisatrice de la Tatmadaw. »
En conclusion, il recommande de se servir de l’Asean pour « donner une apparence d’activité et rester engagé avec la junte » et « surtout de rassembler le courage politique d’être patient ».
Les travailleurs de Birmanie, qui ont joué un rôle important dans la lutte contre la dictature, ne peuvent compter que sur eux-mêmes pour la renverser et déjouer les sordides calculs des dirigeants impérialistes.