Rwanda 1994 : l’impérialisme français complice de génocide31/03/20212021Journal/medias/journalarticle/images/2021/03/P8-1_Rwanda_responsables_mais_pas_coupables_ok_Lupo.jpg.420x236_q85_box-0%2C147%2C545%2C453_crop_detail.jpg

Dans le monde

Rwanda 1994 : l’impérialisme français complice de génocide

Le rapport de la commission Duclert sur le rôle de la France au Rwanda a été rendu le 26 mars. Cette commission d’historiens choisis a obéi aux consignes de Macron, désireux de renvoyer la responsabilité à ses prédécesseurs, et en particulier à Mitterrand.

Illustration - l’impérialisme français complice de génocide

Le rapport n’en sert pas moins à disculper l’appareil d’État français de toute complicité envers le génocide des Tutsis, tout en essayant de donner des gages au gouvernement rwandais.

Les historiens, tout en reconnaissant des « responsabilités lourdes et accablantes » de la France, refusent de parler de complicité dans le génocide méticuleusement préparé par le gouvernement rwandais en 1994, pourtant totalement et inconditionnellement soutenu par le pouvoir français.

L’escamotage consiste à prétexter que, le gouvernement français n’ayant pas eu l’intention du génocide, il ne peut donc pas en être considéré comme le complice. Non seulement il faut passer sur des documents et des faits pour arriver à cette conclusion mensongère, mais surtout c’est une façon d’exonérer l’impérialisme de ses propres crimes passés, présents… et futurs.

Le rapport reconnaît des responsabilités et des erreurs. La commission a dénoncé un « aveuglement idéologique » de la part des gouvernants français de l’époque, en particulier de Mitterrand et de ses ministres. En effet, ceux-ci ont les mains couvertes de sang – et pas seulement celui des Tutsis du Rwanda. Mais, en accusant les hommes politiques de 1994 de pratiques politiques « irrégulières », « de dérives institutionnelles », la commission fait mine de croire que le soutien à un régime génocidaire a découlé de l’égarement de ces politiciens, de leurs « stéréotypes coloniaux ». Le rapport déborde d’expressions comme « sidération » ou « défaite de la pensée », pour expliquer le soutien de la France au régime d’Habyarimana. Le tout permet au président de cette commission, Duclert, de conclure que « la France n’a rien su ni compris des événements ».

C’est un mensonge scandaleux. La politique de Mitterrand au Rwanda en 1994 était dans la continuité de celle de la France partout dans ses ex-colonies africaines, ou encore durant la guerre d’Algérie. Les dirigeants politiques français savaient pertinemment ce qui se tramait au Rwanda, mais ils s’en moquaient, car les intérêts de leur impérialisme étaient leur seul horizon hier, comme il l’est aujourd’hui.

La dictature rwandaise en 1994 était un allié de la France, qui ne voulait pas que les intérêts américains détrônent les siens dans cette partie de l’Afrique des Grands Lacs riche en minerais. Or l’avancée des opposants rwandais, à travers la guerre menée par le Front patriotique rwandais (FPR), principalement composé de Tutsis forcés à l’exil, menaçait ces intérêts.

C’est pour cela que sans faillir, des années 1970 à la fin du génocide, la France a soutenu la dictature d’Habyarimina puis de ses successeurs génocidaires. L’armée française arma et forma les milices qui allaient ensuite massacrer un million de personnes, dans leur immense majorité des Tutsis, mais aussi des opposants Hutus, entre avril et juin 1994. Ce génocide était préparé et donc prévisible depuis des années. La propagande raciste anti-Tutsi était officielle. Dans un fax datant de 1990, l’ambassadeur français au Rwanda, Georges Martres, utilisait déjà les mots « génocide » et « élimination totale des Tutsis ».

Cela n’empêcha pas la France d’envoyer des troupes dès 1990 pour contrer le FPR. Pendant les trois mois qu’ont duré les massacres de masse des Tutsis et de tous ceux qui s’opposaient au génocide, les dirigeants français n’ont jamais cessé de soutenir activement le gouvernement de Kigali et ont continué à lui envoyer des armes. Puis, lorsque le FPR s’empara de la capitale, les militaires français protégèrent la retraite des génocidaires Hutus vers le Congo voisin, où ils continuèrent à semer la mort pendant des décennies.

Il est vrai que, si les dirigeants de l’appareil d’État français, dont le président de l’époque, François Mitterrand, firent le choix de soutenir jusqu’au bout les génocidaires, ce n’était pas dans l’intention de massacrer les Tutsis, mais pour préserver coûte que coûte leur zone d’influence. Au même moment, dans le pays voisin, le Burundi, la France soutenait d’ailleurs une dictature dirigée par des politiciens Tutsis parce que, là, c’était ce choix qui favorisait ses intérêts. Mais cela montre jusqu’où les politiciens de la prétendue démocratie française sont prêts à aller pour défendre les intérêts de leurs capitalistes.

Non seulement les dirigeants d’alors ont été complices de ce crime, mais leurs successeurs poursuivent la même politique, qui peut aboutir aux mêmes extrémités. Pour arrêter les bains de sang qu’engendre la domination des grandes puissances impérialistes, il faudra se débarrasser, non seulement de leurs politiciens assassins, mais surtout du système à l’origine de cette barbarie.

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