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Leur société
Affaire Karachi : Balladur ne savait rien
La Cour de justice de la République a été fidèle à sa réputation d’être clémente dès qu’il s’agit de condamner un ministre.
Le gagnant cette fois est Balladur, qui comparaissait dans une affaire de corruption dont l’argent avait servi à financer sa campagne électorale de 1995, quand il se rêvait président à la place de Chirac.
Ces commissions versées à des intermédiaires pour la négociation de contrats d’armement ont été détournées vers le compte de campagne de Balladur. Vingt-cinq ans après les faits, la Cour a estimé que celui-ci n’était au courant de rien et il a donc été relaxé. Voilà un ex-premier ministre, dans la « tradition républicaine » dont on parle tant, c’est-à-dire ignorant tout de ce qui le concerne et donc ni responsable ni coupable.
Il y aurait de quoi sourire si ce détournement d’argent n’avait pas entraîné la mort de 14 employés de la Direction des constructions navales, victimes d’un attentat de représailles venant sans doute d’un intermédiaire floué. Les familles des défunts n’avaient pas le sourire en apprenant le verdict dans l’affaire dite de Karachi. Elles pouvaient penser que l’innocent avait du sang sur les mains.
Le comparse de Balladur, l’ex-ministre François Léotard, a été moins chanceux puisqu’il écope d’une peine de prison de deux ans, certes avec sursis, et d’une amende de 100 000 euros. Là encore la Cour est fidèle à sa tradition : on ne met pas de ministre en prison.
Balladur va pouvoir couler des jours heureux.
Dans cette affaire, le tribunal correctionnel de Paris, avait prononcé six condamnations le 15 juin dernier, pour abus de biens sociaux, complicité ou recel. Ce tribunal a en effet estimé qu’aucun des six prévenus ne pouvait ignorer « l’origine douteuse » des fonds versés sur le compte de campagne de Balladur.
Ont ainsi été condamnés le conseiller de François Léotard au ministère de la Défense, Renaud Donnadieu de Vabres, à cinq ans de prison dont deux avec sursis et 120 000 euros d’amende ; le directeur de cabinet et chef de campagne de Balladur, Nicolas Bazire, condamné à cinq ans de prison dont deux avec sursis et 300 000 euros d’amende, un homme qui pantoufle aujourd’hui chez LVMH ; Thierry Gaubert, du ministère du Budget, a été condamné à quatre ans de prison dont deux ferme et 120 000 euros d’amende ; Dominique Castellan, PDG de la branche internationale de la DCN, a eu trois ans de prison dont un avec sursis et 50 000 euros d’amende ; et bien sûr les deux intermédiaires, Ziad Takieddine et Abdul Rahman El-Assir, ont été condamnés à cinq ans de prison. Tous ont fait appel, ce qui suspend les peines.
Ce jugement confirme du moins que cette affaire de corruption n’était pas une chimère. Quel dommage que Balladur n’en ait pas été informé !