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Espagne : pour la libération de Pablo Hasel et contre la ‘‘loi bâillon’’
Mardi 16 février, en Espagne, le rappeur catalan Pablo Hasel était arrêté dans l’université de Lerida où il s’était réfugié, embarqué par la police, conduit en prison.
Il avait été condamné à neuf mois d’incarcération pour insulte à la Couronne, aux institutions de l’État et apologie du terrorisme. Il a en outre écopé de deux ans et demi supplémentaires d’un précédent procès.
Aussitôt, à Lérida et dans plusieurs villes d’Espagne, les manifestations se sont multipliées pour la libération de Pablo Hasel. C’est à Barcelone qu’elles sont les plus importantes. Il y a eu des dizaines d’arrestations et les « mossos » de la police catalane ont été particulièrement violents, chargeant brutalement et faisant des dizaines de blessés. Une manifestante de 19 ans a perdu un œil et les images de cette violence policière ont circulé dans tout le pays.
Le cas de Pablo Hasel est sans doute la goutte d’eau qui a fait déborder un vase déjà bien plein : dans tout le pays, le nombre de précaires et de chômeurs augmente, les luttes ouvrières ou les regroupements contre les expulsions se terminent par des amendes ou de la prison...
Pablo Hasel n’hésite pas dans ses chansons à dénoncer la corruption de l’ancien roi Juan Carlos, réfugié à Dubaï après avoir pris des commissions sur la vente d’armes, à dénoncer les corrompus et les franquistes qui gangrènent l’appareil d’État. Cela lui vaut une certaine popularité dans la jeunesse.
Les condamnations actuelles se basent sur les articles de la loi votée après le mouvement des Indignés, qui visait à interdire toute occupation de place, manifestation non contrôlée mais aussi attaque contre les institutions. Les occupations de places de 2011 et les énormes défilés d’alors avaient mobilisé dans tout le pays des millions de jeunes et de travailleurs, pour dénoncer les licenciements, la corruption des banques et des politiciens. Quelques années plus tard, le gouvernement de droite de Mariano Rajoy a fait approuver une loi dite « de protection de la sécurité citoyenne », que tout le monde appelle la « ley Mordaza » ( la loi bâillon ).
L’ensemble de ces articles de loi permet de sanctionner par de fortes amendes ou de la prison tous ceux qui critiquent le roi, l’État, les juges, la religion, ou les organisateurs d’un rassemblement non autorisé. Des artistes ainsi ont été accusés et condamnés, et aussi de nombreux militants, des syndicalistes pour « piquet illégal » ou rassemblements interdits. L’appareil judiciaire, composé de franquistes notoires, punit durement en faisant la chasse à tous ceux qui osent dénoncer ou même ironiser sur la famille royale, l’Église et l’État… Quant au gouvernement de gauche, coalition des partis socialiste, communiste et Podemos, il a conservé la « loi baillon », comme il a d’ailleurs conservé toutes les lois antiouvrières prises par la droite, dont la loi Travail.
Les manifestations pour la libération de Pablo Hasel expriment la colère de tous ceux que choquent ces atteintes à la liberté d’expression et qui sont révoltés de voir qu’en Espagne, aujourd’hui, des franquistes peuvent organiser des cortèges faisant ouvertement l’apologie du nazisme, que les corrompus sont protégés, alors que sont jetés en prison des jeunes qui dénoncent le capitalisme.
Beaucoup pensent que ces jeunes rappeurs disent la vérité et les manifestants veulent pouvoir continuer à dénoncer ce qui les choque. Comme ils le disent sur leurs pancartes : « Protester est un droit, réprimer est un crime. »