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Leur société
Jarnac : dans les pas d’un maître de l’arnaque
Le vingt-cinquième anniversaire de la mort de François Mitterrand a rassemblé au cimetière de Jarnac, sa ville natale, des figures du Parti socialiste et Emmanuel Macron, qui avait choisi de rendre un hommage à ce président prétendument socialiste.
En mal de popularité et d’électeurs pour 2022, Macron se fait une spécialité de l’hommage rendu aux anciens présidents de la République, morts ou vivants. Il a loué Giscard après sa mort, puis l’intuition de Sarkozy pour avoir ouvert un débat sur « l’identité nationale » quand il était à l’Élysée. Le coup de Jarnac de Macron rééquilibre la barque présidentielle, chargée en déclarations ou projets de loi de droite, en se prosternant devant la tombe d’un président de gauche.
Mais les dirigeants du Parti socialiste, auxquels Macron a volé la vedette, n’étaient pas moins dans l’opération politicienne et le mensonge. L’ancien président François Hollande, qui avait fait de Macron son ministre, Ségolène Royal, l’ancienne candidate à l’Élysée battue par Sarkozy, ou Olivier Faure, l’actuel premier secrétaire d’un Parti socialiste aux abois, tous ont rappelé leur adoration de Mitterrand, décrit comme un anti-Macron. « Il n’y a rien de commun entre l’homme des conquêtes sociales, qui défendait les services publics, et celui qui n’a eu de cesse de les détruire jusqu’à ce qu’il soit rattrapé par la crise sanitaire », s’est indignée Ségolène Royal.
La palme de l’idolâtrie est revenue à Mélenchon qui, sans être présent à Jarnac, a rappelé lui aussi sa fidélité à Mitterrand. Au Parti socialiste de 1976 à 2008, le leader de la France insoumise s’est fâché contre Macron : « Sa présence à Jarnac est écœurante […] François Mitterrand, c’est la retraite à 60 ans, le programme commun, la lutte contre le capital. Qu’il respecte notre deuil. »
Mitterrand, symbole de la lutte contre le capital : il fallait oser. Il a commencé sa carrière sous Pétain comme homme de droite. Il a été onze fois ministre dans des gouvernements les plus antiouvriers et anticommunistes de la IVe République ; dans ses fonctions, il a défendu l’envoi du contingent en Algérie et ordonné des exécutions de militants du FLN emprisonnés. S’il a pu faire sa mutation en chef de file de la gauche en mettant la main sur ce qui restait du Parti socialiste au début des années 1970, c’est grâce au PCF qui a fait de ses centaines de milliers de militants et de sympathisants, dans les entreprises et les quartiers populaires, les porteurs d’eau de ce politicien. L’opération a permis à Mitterrand d’emporter la présidentielle en 1981. Mais en 1995, quand il a quitté l’Élysée après des années d’austérité de gauche, de blocage des salaires, de licenciements massifs, les travailleurs n’avaient aucune raison de le regretter.
La carrière de Mitterrand, inspirée par un opportunisme constant, a de quoi servir de modèle à un politicien comme Macron et rendre nostalgiques ou envieux les ténors aphones du Parti socialiste ou le tonitruant Mélenchon. Les travailleurs conscients leur laissent volontiers ce cadavre, il appartient à la bourgeoisie et à ses serviteurs.