Le pouvoir et sa majorité : de crises en crise politique02/12/20202020Journal/medias/journalnumero/images/2020/12/2731.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Le pouvoir et sa majorité : de crises en crise politique

Macron se félicitait, il y a peu, que 388 députés, une très large majorité donc, aient approuvé sa loi Sécurité globale, avec son article 24 qui interdit de fait de filmer les auteurs de violences policières.

Le parti macroniste LREM y avait rallié la droite et l’extrême droite lepéniste. Le Sénat, à droite, devait suivre…

Mais, face à la montée de la contestation, le Premier ministre a proposé qu’une commission réécrive l’article 24. Le président de l’Assemblée, Richard Ferrand, a dénoncé ce projet comme une « atteinte aux prérogatives du Parlement, qui seul écrit et vote la loi ». Et, fort du soutien des députés LREM excédés que Macron et Castex les ignorent, il a forcé ce dernier à reculer.

Xavier Bertrand, président du conseil régional des Hauts-de-France et possible rival de Macron à la présidentielle de 2022, avait soutenu cette loi. Mais, comme plusieurs de ses compères de droite, du centre et de LREM, il a déclaré : « Le responsable de tout cela, c’est le président de la République (…), qui avait fait cette promesse (aux policiers) en recevant leurs syndicats. »

En quelques jours, une véritable crise politique s’est donc ajoutée à toutes les autres, sanitaire, économique, sociale, etc., dont Macron aimerait persuader l’électorat que lui seul est à même de venir à bout. Il ne suffit pas de s’afficher depuis des mois en chef de guerre présidant un Conseil de défense, de célébrer de Gaulle, de multiplier les postures sécuritaires pour éviter qu’à la tête de la majorité certains ne se mettent à jouer leur propre partition.

La division des tâches pour flatter différents électorats et fractions de l’appareil étatique est orchestrée par Macron lui-même. Pour cajoler la police, indispensable pour réprimer d’inévitables réactions des travailleurs, et pour ne pas laisser à Marine Le Pen le monopole de l’électorat réactionnaire, il a besoin d’un Darmanin, préposé à caresser les policiers dans le sens du poil, « quoi qu’il en coûte ». Celui-ci leur promet donc une loi qui, sur le plan juridique, ne les protège pas plus que l’attirail déjà existant. Mais cette loi, censée rapporter des voix à Macron, peut aussi lui créer des problèmes. En effet les entraves qu’elle lève chez les policiers et, à l’opposé, le rejet qu’elle suscite dans une large fraction de la population, gênent ses tentatives pour durcir les institutions et leur fonctionnement.

Alors, Macron essaie de gérer cette nouvelle crise en sortant quelques gadgets de son chapeau : en disant qu’on va améliorer la formation des policiers ; qu’on va rendre indépendante – de qui, de quoi, comment ? – l’Inspection générale de la police, censée réprimer les comportements violents ou racistes des policiers ; en remaniant au Parlement l’article 24… Il lui faut aussi ménager les caciques de sa majorité – les Castex, Ferrand, Darmanin, Dupont-Moretti et autres Bayrou –, en prenant garde de ne pas s’aliéner les policiers, alors que ceux qu’indignent les violences des forces dites de l’ordre, autrement dit de l’ordre social des classes possédantes, sont de plus en plus nombreux.

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