Soudan-Israël : un accord obtenu au chantage28/10/20202020Journal/medias/journalnumero/images/2020/10/2726.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Soudan-Israël : un accord obtenu au chantage

Donald Trump a annoncé le 23 octobre que le Soudan allait normaliser ses relations avec Israël, et donc reconnaître ce pays. C’est le troisième succès du gouvernement américain dans ses efforts pour trouver des alliés arabes à Israël, après Bahreïn et les Émirats arabes unis.

À quelques jours des élections, Trump a brandi cet accord pour conforter tout ce que le pays compte de fanatiques pro-israéliens, évangéliques, ligues d’extrême droite et autres. Il l’avait déjà fait avec son « plan de paix » proposant le rattachement à Israël des colonies situées en territoire palestinien et l’annexion de la plus grande partie de la vallée du Jourdain. « Pensez-vous que Joe-l’endormi (Joe Biden) aurait pu conclure cet accord ? », n’a-t-il pas manqué de déclarer.

Cet accord permet au Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou, de souligner l’abandon des Palestiniens par les pays arabes. C’est à Khartoum, la capitale du Soudan, qu’avaient été signés en 1967 les accords par lesquels leurs dirigeants s’étaient engagés à ne jamais reconnaître Israël. Ce soutien aux Palestiniens n’a jamais été que de pure forme, mais la reconnaissance d’Israël par le Soudan n’en est pas moins un symbole, même si d’autres pays arabes, comme l’Égypte ou la Jordanie, y avaient procédé depuis longtemps. Et, pour le côté pratique, Israël pourra en profiter pour renvoyer au Soudan les 6 000 réfugiés soudanais vivant dans le pays.

Quant au régime soudanais, la reconnaissance d’Israël est le prix à payer pour que les États-Unis le rayent de la liste des États soutenant le terrorisme. Cela écarte depuis vingt-sept ans le Soudan des transactions en dollars et restreint son accès aux investissements étrangers. Il figurait sur cette liste depuis que le régime d’Omar el Bachir avait accueilli le fondateur d’al- Qaida, Oussama Ben Laden, en 1993. Il a fallu remplir une autre condition : le paiement par le Soudan d’une somme de 335 millions de dollars aux familles des Américains victimes des attentats contre les ambassades américaines au Kenya et en Tanzanie en 1998, et aux familles des 17 marins du destroyer USS Cole tués en 2000 lors d’une attaque suicide au large du Yémen.

Le retrait de la liste des États terroristes est la seule perspective offerte à la population par le gouvernement qui dirige les pays depuis le renversement d’Omar el Bachir en avril 2019, alors que les prix ne cessent d’augmenter et que les classes populaires voient leur sort empirer. Dans ce pays aux abois sur le plan économique, les ministres civils qui servent de paravent aux chefs militaires affirment qu’une fois les sanctions levées les capitaux vont affluer et que le sort de tous en sera amélioré. Comme si dans l’Éthiopie voisine, cet eldorado récent des capitaux étrangers, le sort de la population pauvre était plus enviable ! Tout au plus y aura-t-il des opportunités supplémentaires de s’enrichir pour une mince couche de profiteurs soudanais et quelques affairistes américains ou européens.

Trump qualifie d’« énorme victoire pour la paix dans le monde » ce qui n’est de sa part qu’une petite mise en scène à but électoral et une banale manœuvre de la diplomatie impérialiste.

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