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Dans le monde
Pologne : nouvelle attaque contre le droit des femmes
Jeudi 22 octobre, la Cour constitutionnelle polonaise a jugé inconstitutionnelle une des clauses de la loi sur l’IVG, celle qui permet aux femmes enceintes d’un fœtus présentant des malformations « graves et irréversibles » d’avorter.
La loi sur l’IVG en Pologne était déjà parmi les plus restrictives. Elle n’autorisait l’avortement que dans trois cas : lorsque la vie de la mère était en danger, lorsque la mère avait été violée ou victime d’un inceste, et si le fœtus présentait des malformations graves et irréversibles. 98 % des 1 100 avortements légaux pratiqués en moyenne chaque année l’étaient pour cette dernière raison. Mais chaque année, deux cent mille femmes avortent illégalement, à l’étranger pour les plus fortunées, et dans des conditions dangereuses et éprouvantes pour les autres.
Pourtant, cette disposition de la loi, voire l’ensemble de la loi, sont devenus une cible du pouvoir polonais. Depuis que le parti réactionnaire PiS (Droit et justice) est arrivé au pouvoir en 2015, il a déjà tenté, en 2016 et 2018, de réduire ces droits pourtant bien limités. Mais il avait dû reculer devant la réaction des femmes et d’une grande partie de la société polonaise.
Depuis le mois de septembre, la coalition autour du PiS, dans laquelle deux petits partis (Pologne solidaire et l’Alliance) lui sont alliés, est secouée par la lutte de leaders plus jeunes et plus réactionnaires qui veulent se mettre en avant. Les détails de cette bagarre sont plutôt grotesques. La crise fait suite à une proposition de loi, dite loi sur la protection animale, portée par le PiS, début septembre. Il s’agit d’interdire les élevages de visons, renards et ratons-laveurs, dont la Pologne est le troisième producteur mondial, et de limiter l’abattage rituel des animaux, la très catholique Pologne étant une grande exportatrice de viande halal et casher. Les petits partis alliés du PiS, voulant avoir le soutien du monde rural, ont refusé cette loi et ont menacé de quitter la coalition gouvernementale, ce qui lui aurait fait perdre la majorité au Parlement. Tout cela s’est terminé par l’entrée au gouvernement d’une part du vieux leader du PiS, Jaroslaw Kaczynski, nommé vice-Premier ministre, et d’autre part d’un nouveau ministre de l’Éducation, ultra-réactionnaire, Przemyslaw Czarnek, connu notamment pour ses prises de positions en faveur des châtiments corporels pour éduquer les enfants.
Dans ce climat, des commerçants, des maires, des autorités régionales, ont été encouragés à se déclarer « zone sans LGBT ». La surenchère réactionnaire s’est déchaînée, les propos antisémites de tout ce petit monde se sont multipliés.
Dès le lendemain de la sentence de la Cour constitutionnelle, et tout le week-end des 24 et 25 octobre, des manifestations de milliers de femmes et d’hommes révoltés par cette décision se sont multipliées, à Varsovie, Gdansk, Cracovie, Lodz, et dans une douzaine d’autres villes. Des manifestants ont même envahi des églises, avec comme slogans « Barbares ! » ou encore « On veut avorter de notre gouvernement ». On ne peut que les soutenir et espérer que le pouvoir réactionnaire soit contraint de reculer.