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Égypte : inégalités et répression accrues
L’Égypte comptait au 15 juin 1 575 décès dus au coronavirus, un bilan en définitive limité pour un pays de 100 millions d’habitants, mais les conséquences sociales sont bien plus graves.
La mise au ralenti de l’économie mondiale a tari des ressources importantes pour le pays. En 2019, des millions de travailleurs égyptiens, installés dans les pays du Golfe et du bassin méditerranéen, embauchés dans l’agriculture, l’industrie ou la construction avaient transféré à leur famille une somme équivalant à 26,8 milliards de dollars. Beaucoup ont aujourd’hui perdu leur emploi et sont dans l’impossibilité de lui venir en aide.
Avec la fermeture des frontières et l’arrêt du transport aérien, les recettes liées au tourisme, près de 13 milliards de dollars en 2019, se sont également effondrées. Des millions de travailleurs se sont retrouvés brutalement à la rue.
Si les secteurs du bâtiment ou de l’agriculture ont été moins affectés par la pandémie, l’industrie et le commerce ont été partiellement à l’arrêt. Pour répondre aux exigences des patrons, le gouvernement a mis en place un confinement très souple et il leur a promis six milliards de dollars d’aides, avec l’aval du FMI qui vient de lui accorder de nouveaux financements. Cela ne peut qu’inquiéter les classes populaires qui subissent toujours le plan d’austérité mis en place après le précédent plan du FMI, qui les a enfoncées dans la pauvreté.
En effet, à la suite de ce plan, les subventions sur les produits de base et l’essence ont été supprimées et celles sur l’énergie et l’électricité réduites, alors que 60 % de la population est considérée comme pauvre et qu’un tiers vit avec moins de 1,3 euro par jour. À l’inverse, l’impôt sur le revenu des sociétés a baissé.Le système d’aide étatique censé agir de manière ciblée contre la pauvreté se révèle être du saupoudrage. Chaque bénéficiaire reçoit 2,50 euros par mois pour s’acheter de l’huile, du riz et autres produits de base dans des épiceries subventionnées. Au-delà de quatre bénéficiaires dans la même famille, la subvention tombe à 1,25 euro par enfant supplémentaire. Mais même cette aide misérable, le FMI la juge trop coûteuse et sous sa pression le gouvernement a radié des millions de personnes de son bénéfice
Le pouvoir utilise la pandémie pour redorer son blason en diffusant en boucle à la télévision des images de camions de l’armée distribuant des colis de produits de première nécessité aux plus démunis. Mais ces mises en scène ne trompent personne au sujet des militaires qui ont accaparé les richesses.
Avant la pandémie, le maréchal Sissi, le président, se vantait d’avoir redressé l’économie et affichait fièrement une croissance du PIB de plus de 5 %. Mais ces chiffres s’accompagnent d’inégalités sociales croissantes, imposées par une dictature de fer. Sissi a fait arrêter des milliers d’opposants politiques, syndicalistes et journalistes. Il s’en prend maintenant à des jeunes influenceuses du réseau social TikTok. L’une d’entre elles, âgée de 17 ans, victime d’un viol, qui a posté une vidéo de son visage couvert de contusions pour dénoncer ce crime, a tout de suite été arrêtée pour « promotion de la débauche ». Mais grâce au soutien qu’elle a reçu et à l’ampleur des protestations, elle a été relâchée.
Sissi peut compter sur le soutien des grandes puissances qui lui vendent des armes et de Trump qui l’a reconnu comme son « dictateur préféré ». Il faut souhaiter que la révolte qui couve les balaye tous les deux ainsi que l’ordre social qu’ils servent.