Féminicides : l’inaction de l’État condamnée22/04/20202020Journal/medias/journalnumero/images/2020/04/2699.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

La société en crise

Féminicides : l’inaction de l’État condamnée

Le Tribunal de grande instance de Paris a condamné l’État pour la « négligence fautive des services de police ayant conduit à l’assassinat » d’Isabelle Thomas et de ses parents par son ex-compagnon, à Grande-Synthe, en août 2014.

Le 27 juin de cette année-là déjà, Isabelle Thomas avait déposé plainte contre cet homme, après des violences, dont une tentative d’étranglement. Placé en garde à vue ce dernier n’avait pas nié les faits. Il était alors placé sous contrôle judiciaire, avec interdiction de voir la victime, jusqu’au procès prévu le 13 août. Le 10 juillet, puis à nouveau le 23 juillet, Isabelle Thomas s’était rendue au commissariat pour raconter les agressions, filatures, menaces qui continuaient. La police s’était alors contentée de convoquer l’agresseur, sans autre conséquence. Enfin, le 4 août, alors qu’Isabelle Thomas avait une fois plus signalé sa présence, il bloquait la voiture de son ex-compagne et commettait le triple meurtre. Arrêté, mais un peu tard, l’agresseur s’est suicidé en prison, ce qui mettait fin à l’action de la justice.

Dans cette affaire, l’un des quelque 120 féminicides commis en France chaque année, la justice ne s’est pas pressée de faire respecter sa décision d’éloignement, la police ne s’est guère souciée de faire exécuter cette même décision ni même de venir au secours d’une personne de toute évidence en danger de mort. Mais combien de femmes sont allées en vain déposer plainte, combien sont toujours menacées alors qu’un jugement en leur faveur a été rendu ? Et combien, surtout, ne tentent même pas d’avoir recours à l’État, persuadées qu’elles sont de l’inutilité d’une telle démarche ?

Car l’État ne fait même pas le minimum, n’applique même pas ses propres lois tout insuffisantes qu’elles soient, pour protéger les femmes en butte à de telles violences. Il aura fallu des années de lutte et des centaines de mortes pour que l’État envisage de trouver des fonds pour mettre à l’abri les femmes battues et leurs enfants.

Il envisage d’ailleurs seulement, car les fonds promis sont ridiculement faibles par rapport aux besoins.

Dans cette situation, chaque femme qui porte plainte et se bat, chaque association qui agit, chaque procès intenté contre l’incurie des services publics compte, car c’est aussi une aide pour toutes les autres.

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