Hôpital psychiatrique de Navarre – Évreux : les soignants livrés à eux-mêmes08/04/20202020Journal/medias/journalnumero/images/2020/04/2697.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

La société en crise

Hôpital psychiatrique de Navarre – Évreux : les soignants livrés à eux-mêmes

Le Nouvel hôpital de Navarre à Éveux est spécialisé en psychiatrie. Avec près de 300 lits, il est quasiment le seul établissement de ce type du département de l’Eure. En temps normal, hors situation épidémique, le personnel est déjà à la limite de la rupture, en particulier en terme d’effectifs.

Depuis l’épidémie de Covid-19 et les contraintes du confinement, le sentiment d’être abandonné par les autorités est encore plus fort. Plus de dix jours après le début du confinement, et alors que les risques épidémiques faisaient la une depuis des semaines, rien n’avait été organisé pour le personnel et les patients. Ce n’est pas spécifique à l’hôpital d’Evreux : aucun plan d’urgence n’avait été lancé dans les hôpitaux psychiatriques par le gouvernement en prévision de la pandémie qui s’annonçait. Il a fallu attendre le week-end des 28-29 mars pour que des masques et du gel hydroalcoolique soient disponibles en quantité satisfaisante. Par contre, aucune tenue de protection complète n’a été distribuée et le travail a continué en simple blouse et pantalon de ville.

Le Covid-19 a bien fait son entrée dans l’hôpital. Un patient a été admis en réanimation et cette première alerte a fait monter l’inquiétude. Quatre autres qui développaient de la fièvre ont été confinés dans une chambre à part. La seule initiative que la direction a prise a donc été d’ouvrir un service de patients contaminés et de jongler avec le personnel en déplaçant les soignants d’un service à l’autre au gré des effectifs. Pour limiter les contacts et les déplacements, la cafétéria a été fermée ; il n’y a plus d’animation et les deux petites salles télé par service, très fréquentées en ce moment, représentent la seule possibilité de distraction. Encore plus que d’habitude, malades et soignants sont confinés, ensemble, dans une promiscuité inévitable.

Du côté de la direction, c’est le service minimum. Elle a abandonné le navire, diront les plus en colère. Si la maladie semble contenue dans l’hôpital, c’est grâce aux équipes soignantes et à leurs initiatives car elles sont souvent restées seules à bord avec les patients.

Ce sont les personnels de base de l’hôpital qui ont trouvé des solutions pour ravitailler des malades en tabac ou en denrées alimentaires qui améliorent l’ordinaire. Ce sont eux qui ont repensé les prises de repas, la distribution des médicaments pour éviter au maximum la promiscuité. Ils ont fait apprendre des règles d’hygiène et des gestes barrières aux malades, dont certains ont des difficultés à comprendre ce qui arrive. Quand les cadres de direction sont réapparus, ils n’ont eu qu’à officialiser ce qui avait été mis en place par les soignants et par ceux qui, épidémie ou pas, font tourner l’hôpital tous les jours.

À l’hôpital de Navarre, au temps du Covid-19, c’est comme d’habitude mais en pire. L’an dernier, un mouvement avait eu lieu parmi le personnel pour la création de 90 postes de soignants supplémentaires. La fièvre contestataire ne va pas diminuer tant l’arrivée de l’épidémie illustre la grande misère de la psychiatrie après des décennies d’économies aux dépens des personnels et des patients.

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