Grèce : pas de frontières pour la politique antiouvrière08/04/20202020Journal/medias/journalnumero/images/2020/04/2697.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Grèce : pas de frontières pour la politique antiouvrière

En Grèce, le gouvernement Mitsotakis a décidé de créer ce qu’il appelle un « filet de protection pour les travailleurs et les entreprises ». C’est en fait une série d’attaques contre les salariés, au nom de la préparation du jour d’après, celui de la sortie de la crise sanitaire.

Ces mesures donnent au patronat des entreprises qui fonctionnent encore la liberté de suspendre les contrats de travail de tout ou partie de leurs salariés sans paye. Ils seront rappelés plus tard… théoriquement. Les patrons peuvent imposer à au moins la moitié du personnel un travail partiel en alternance pendant six mois, réduire de moitié le temps de travail mensuel, donc à deux semaines, ainsi que la paye, muter les travailleurs d’une usine à l’autre au sein d’un groupe sans garantie pour eux de retrouver leur poste antérieur après la crise.

Le ministre du Travail a assuré qu’il n’y aurait pas de licenciements, qu’une allocation de 800 euros serait versée, fin avril, à ceux qui ont perdu leur travail depuis le 1er mars, à condition qu’ils n’aient pas déjà droit à une allocation-chômage. Tout cela est pris sur le budget de l’État, qui paie les cotisations sociales et a reporté le paiement des impôts et des dettes des sociétés.

Mais comment un versement unique de 800 euros pour 45 jours pourrait-il remplacer un salaire ? Comment faire croire au retour à l’emploi à l’issue d’une suspension de contrat, à une population qui a vécu dix ans d’austérité pendant lesquels les gouvernements successifs lui faisaient régulièrement miroiter une sortie de crise ? Fin décembre 2019, le pays comptait encore officiellement près de 800 000 chômeurs, auxquels il faut ajouter ceux qui n’ont plus droit aux allocations, et 42 000 licenciements ont été enregistrés durant les deux premières semaines de mars. La plupart des commerces sont fermés, les entreprises sont à l’arrêt ou au ralenti, et ce sont les travailleurs qui payent la note, y compris celle des quelques mesures décidées par le gouvernement pour sauver les entreprises.

Bien sûr, parmi celles-ci, beaucoup sont de petites ou même très petites entreprises au bord de la faillite. Mais celles qui peuvent tirer leur épingle du jeu le feront aux dépens de leurs salariés. Des travailleurs ont même dénoncé l’attitude de leur entreprise qui a mis une partie d’entre eux en chômage partiel et obligé les autres à dépasser les horaires, jusqu’à 12 heures de travail par jour, comme le rapporte le journal du PC grec Rizospastis.

Quant aux grandes sociétés cotées du bâtiment et de l’énergie, comme Mytilineos ou Ellaktor, citées par la presse économique, elles disent que « grâce à leurs fortes liquidités, elles vont s’arranger pour surmonter la crise ». En réalité pour le patronat, le moyen le plus simple reste le licenciement massif, favorisé par l’utilisation quasi permanente des contrats précaires. Fin mars, les employés des services au sol des compagnies aériennes Swissport et Skyserv ont reçu par sms un avis les informant de leur licenciement pour les précaires et de leur mise en travail partiel à mi-salaire pour les travailleurs en CDI. La direction du groupe, pleurnichant sur la conjoncture, s’est excusée de ce message brutal à ses 300 travailleurs, trop nombreux disait-elle pour être prévenus individuellement !

Après dix ans de crise économique et de mesures drastiques imposées par les créanciers européens et mises en place par différents gouvernements, les droits des travailleurs ont déjà été largement amputés. Les dernières mesures laissent un peu plus les mains libres au patronat maintenant et dans l’avenir.

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