SNCF : le moral est dans le camp des grévistes !31/12/20192019Journal/medias/journalarticle/images/2019/12/P6_SNCF_2019_12_26_Manif_Gare_Est_a_St-Lazare_C_LO.jpg.420x236_q85_box-0%2C42%2C800%2C491_crop_detail.jpg

dans le mouvement

SNCF : le moral est dans le camp des grévistes !

Élisabeth Borne pensait afficher son dédain et son mépris pour les grévistes en s’envolant pour le Maroc en vacances de Noël. Mais elle a dû revenir ventre à terre : cela l’affichait mal, pour une ministre des Transports, de partir faire bombance alors qu’elle venait d’accuser les grévistes « de priver les Français de vacances ».

Illustration - le moral est dans le camp des grévistes !

C’est donc une ministre pleine de rancœur qui a dû mettre en scène avec son secrétaire d’État aux Transports, Djebarri, une visite dans un centre opérationnel de la SNCF. Las ! Malgré tous les pronostics gouvernementaux qui espéraient un essoufflement de la grève à l’occasion des fêtes, il n’y avait toujours guère de trains au tableau d’affichage et l’ambiance était morose du côté direction et gouvernement. Seulement un transilien sur cinq et trois intercités sur dix circulaient. À propos des TGV en service, les journalistes présents ont demandé pourquoi plusieurs circulaient presque vides, entraînant embarras et cafouillage des deux acolytes. En effet, les voyageurs potentiels ont renoncé, après leurs multiples mésaventures, à faire confiance aux communications de la SNCF et du gouvernement. Borne, elle-même, avait promis la semaine précédente aux 850 000 possesseurs de billets qu’ils auraient leur train, pour leur annoncer ensuite qu’il n’y aurait simplement « aucun frais » en cas d’échange de billet ou de transfert sur un autre train… ce qui est bien autre chose.

Les injures de Djebarri

Djebarri s’est vengé de tous ces grévistes, dont la résistance entache sa jeune carrière, en les injuriant et les menaçant copieusement dans Le Journal du Dimanche. Il veut attribuer le maintien et le succès de la grève, non pas au rejet absolu de sa réforme chez les travailleurs du transport, mais « à la pression anormale qui s’exerce sur une partie des cheminots ». Et d’ajouter qu’il a « demandé aux dirigeants de la SNCF et de la RATP d’être vigilants et d’agir de façon résolue face à des attitudes d’intimidation, de harcèlement, voire d’agression dont seraient victimes les agents qui ont fait le choix de travailler ».

Tous ceux qui ont fréquenté les piquets de grève, les prises de parole et les échanges entre les grévistes et leurs camarades qui temporairement ont repris le travail, savent que la seule pression vient de la hiérarchie et est d’abord financière, à raison de 80 à 100 euros de retenue journalière. Si ceux qui ont continûment reconduit la grève jusqu’à aujourd’hui l’ont fait, c’est justement parce qu’ils savent que les non-grévistes d’un jour seront grévistes à la prochaine occasion. Et inversement, ceux qui ont repris le travail savent qu’ils pourront se remettre dans le mouvement justement parce que la fraction la plus déterminée a maintenu le flambeau, sans faiblir. Et tous se sentent appartenir au même camp.

Mais un Djebarri ne s’adresse pas aux cheminots, mais à la fraction de la population qu’il espère dresser contre les grévistes. Dans son élan, il accuse la CGT, là encore de « blocage et d’intimidation » et d’« d’actions illégales » et, injure suprême pour un petit commis du capital, de « politisation à l’extrême gauche ».

Le gouvernement sous la pression des grévistes

Mais, là encore, le gouvernement va de déconvenue en déconvenue. Le soutien populaire va encore aux grévistes malgré la galère dont les travailleurs rendent d’abord responsable le gouvernement. Les grévistes ont pu le constater autour d’eux dans les multiples rassemblements et repas festifs.

Élisabeth Borne a donc dû calmer son subordonné, disant : « Ce n’est jamais une bonne solution de commencer à s’invectiver de cette façon ». Et elle a prétendu, le 30 décembre, avoir présenté « des garanties fortes » et des « avancées en terme de transition » car « on a vraiment pris en compte l’attachement des agents de la RATP et de la SNCF à leur régime spécial ».

Changement de ton donc, mais Borne n’a toujours pas « pris en compte », et c’est sans doute difficile à saisir pour des politiciens pour qui l’âme humaine se résume à l’individualisme grossier de la bourgeoisie, que, loin de tout corporatisme, l’aile marchante de la grève se bat non pour elle-même, mais « pour l’honneur des travailleurs et pour un monde meilleur », comme le clame la chanson reprise dans les manifestations.

Alors le vœu de Borne que la grève s’arrête sans que soit retiré le projet de réforme par points ne vaut pas mieux que les précédentes manœuvres du gouvernement.

Après avoir franchi avec succès le cap de la période des fêtes, il est vital que la sympathie du monde du travail qui s’exprime, moralement et aussi quelquefois matériellement au travers de caisses de grève, devienne une participation active à ce combat. De nombreux comités de grève et de nombreux militants syndicaux poussent, à juste titre, à des visites, des prises de parole devant des entreprises du privé. Plusieurs secteurs en lutte avant les congés scolaires comme les enseignants doivent se remettre dans le mouvement. Les jours à venir seront décisifs pour les grévistes qui doivent tenir bon sous la pression, pour ceux qui ont repris provisoirement ou étaient en congés et vont reprendre le mouvement et aussi pour les travailleurs qui hésitaient jusque-là à entrer dans la lutte. C’est le moment !

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