ADP : contre la privatisation, il faudra plus qu’une pétition19/06/20192019Journal/medias/journalnumero/images/2019/06/2655.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

ADP : contre la privatisation, il faudra plus qu’une pétition

Une pétition vient d’être lancée pour obtenir un référendum sur la privatisation de l’entreprise publique Aéroports de Paris (ADP). Si cette pétition obtient plus de 4,7 millions de signatures, le gouvernement se verra peut-être contraint d’organiser ce référendum.

Signer une pétition pour exprimer sa colère contre la privatisation d’ADP et réclamer en même temps d’avoir son mot à dire sur ce point de la politique du gouvernement est tout à fait légitime. Quant à dire qu’il s’agit d’un moyen efficace de lutter contre cette politique, c’est une autre histoire.

C’est à l’occasion du débat parlementaire sur la loi Pacte, qui comportait la privatisation d’ADP, que 248 députés et sénateurs, pas seulement de gauche, ont obtenu le lancement de cette pétition officielle visant à réclamer un référendum d’initiative partagée (RIP).

En même temps, pour ces opposants à Macron, il s’agit de mener une opération politique. Les partis de gauche espèrent se refaire une santé dans une campagne contre la politique de privatisation. Un premier meeting commun est organisé le 19 juin à Paris, entre PS, PCF et FI. L’ex-ministre de droite Gilles Carrez y est aussi invité à venir condamner la politique de Macron.

Tous ceux-là se souviennent que les campagnes contre le traité de Maastricht en 1992 et contre le traité constitutionnel européen en 2005 leur avaient été favorables. Ils espèrent pouvoir refaire la même chose et ainsi empêcher Macron de les faire disparaître du paysage en réduisant l’arène politique en France à l’opposition unique entre le RN et La République en marche. En s’opposant électoralement parlant à la privatisation d’ADP, c’est leur avenir politique qu’il veulent préserver.

Certains responsables politiques tentent avec cette campagne de réaliser une forme d’union de la gauche, afin de favoriser la préparation d’accords électoraux pour les futures échéances électorales. La privatisation d’ADP n’est pas de ce point de vue leur préoccupation centrale. D’ailleurs ils savent que, même si un référendum est finalement obtenu, rien ne dit qu’il empêchera la privatisation. Bien des exemples le montrent.

En 2005, la campagne contre le traité constitutionnel avait bien abouti à un non majoritaire, mais le gouvernement était passé outre, pour imposer l’intérêt de la bourgeoisie quelle que soit l’expression de la volonté populaire. Quant à croire que faire voter la population serait le moyen infaillible d’imposer la volonté des travailleurs, cela aussi est illusoire, ne serait-ce que parce que, à l’échelle de la population, toutes couches confondues, rien ne garantit que le non l’emporte, et l’opération peut alors se retourner contre eux. En Italie en 1985, le Parti communiste et le syndicat CGIL avaient appelé à un référendum contre un décret remettant en cause l’indexation des salaires sur l’inflation. La loi avait en fait été approuvée à la majorité et les intérêts de classe des travailleurs avaient été bafoués de façon faussement démocratique.

Les travailleurs, à commencer par ceux d’ADP, ont bien raison de ne pas vouloir de cette privatisation. Mais, pour lutter contre les attaques contre eux qu’elle laisse présager, ils devront faire bien plus confiance à leurs propres forces qu’au référendum.

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