Libye : rivalités politiques, milices et or noir01/05/20192019Journal/medias/journalnumero/images/2019/05/2648.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Libye : rivalités politiques, milices et or noir

L’offensive du général Haftar pour faire tomber Tripoli et s’assurer le contrôle sur l’ensemble de la Libye s’embourbe. Elle a déjà fait 350 morts et déplacé 40 000 personnes. Haftar se heurte à la résistance des milices loyales à Faïez Sarraj, chef du gouvernement reconnu par l’ONU. Il déçoit ses divers parrains, officiels ou officieux, qui misaient sur cet ancien proche de Kadhafi pour restaurer un pouvoir fort sur l’ensemble du pays.

Parmi ses parrains officieux, il y a le gouvernement français dont la politique en Libye est d’un cynisme sans limite. Après avoir éliminé, sous Sarkozy, le dictateur Kadhafi et livré le pays au pillage de milices aussi féroces que rivales, les différents services diplomatiques ou militaires n’ont cessé de grenouiller à la recherche d’un nouvel homme fort.

La Libye, comme toute l’Afrique, est un terrain où se heurtent les rivalités entre grandes puissances. La France et l’Italie, mais aussi les États-Unis et la Grande-Bretagne, sont en rivalité pour le contrôle du pétrole. L’Union européenne et l’Italie au premier chef payent des milices pour empêcher le départ des migrants depuis les côtes libyennes. La France cherche à bloquer la progression des milices islamiques qui dé­sta­bilisent le Niger et tout le Sahel où Areva, Total et Bolloré ont des intérêts.

En 2015, les accords internationaux de Skhirat au Maroc ont fait de Sarraj, soutenu surtout par l’Italie et la Turquie, le Premier ministre officiel, basé à Tripoli et reconnu par les grandes puissances. Mais Sarraj contrôlait à peine son bureau ; ni l’instabilité du pays ni les rivalités entre puissances n’ont cessé. Haftar, lié aux États-Unis, soutenu par l’Égypte de al-Sissi, les Émirats arabes unis et l’Arabie saoudite, s’est posé en rempart contre les milices islamistes. Il a fini par s’imposer dans l’est de la Libye, autour de Benghazi et Tobrouk. Alors que la France reconnaissait officiellement Sarraj, elle apportait aussi son soutien à Haftar. Hollande, aujourd’hui très bavard, raconte : « J’ai veillé à considérer Sarraj comme la seule autorité légitime même si, dans le même temps, nous avons soutenu le général Haftar dans sa lutte contre le terrorisme. » Cette politique s’est traduite en 2016 par des caisses d’armes et des conseillers militaires et s’est visiblement poursuivie sous Macron. Ce soutien, ajouté à celui d’al-Sissi et de Trump, a contribué à déclencher l’offensive actuelle.

Sarraj et Haftar ne valent pas mieux l’un que l’autre pour la population libyenne. Ils s’appuient sur des milices aussi brutales, qui pratiquent le même pillage et rançonnent les plus faibles. En les soutenant alternativement ou simultanément, les Hollande, Macron ou Le Drian, qui parlent de « démocratie », de « lutte contre le terrorisme » ou des « valeurs humanistes » avec des trémolos dans la voix, montrent ce qu’ils sont : des barbouzes en chef au service d’intérêts pétroliers.

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