Loi anticasseurs : une loi antimanifestations06/02/20192019Journal/medias/journalnumero/images/2019/02/2636.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Loi anticasseurs : une loi antimanifestations

En présentant la loi dite anticasseurs aux députés le 28 janvier, le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, a déclaré qu’il était temps de « stopper les brutes ».

Par ce terme répété à plusieurs reprises dans son discours, il ne désignait pas les policiers ayant matraqué les manifestants ou leur ayant tiré dessus à coups de balles en caoutchouc au point de les éborgner ou de les défigurer.

Pour le ministre, la violence de la police est légitime et tout son texte vise à lui donner davantage de moyens de réprimer les manifestants.

Annoncée par le Premier ministre au lendemain d’un samedi de mobilisation, cette loi, inspirée d’une proposition d’un sénateur de droite, a pour premier objectif de montrer à l’opinion réactionnaire que le gouvernement ne se laisse pas déborder par la contestation et le désordre. La prétendue ultra-violence des manifestants lui sert de prétexte à une mise en scène et lui permet de multiplier les coups de menton.

L’article le plus emblématique autorise les préfets à interdire de manifestation qui bon leur semble, pourvu qu’ils puissent l’accuser de menacer l’ordre public. Une telle interdiction est prévue par les lois sur l’État d’urgence de 2015, mais jusque-là elle devait être motivée par un juge.

En supprimant même ce petit obstacle, le gouvernement fait donc un pas supplémentaire. Tout individu accusé d’avoir commis des violences lors de manifestations précédentes, même s’il n’a pas été condamné par la justice, pourra donc se voir interdire de manifester, et ce sur tout le territoire national.

La nouvelle loi permet aussi à la police de fouiller les bagages et les voitures sur les lieux d’une manifestation ou à ses abords immédiats. Le gouvernement a pour le moment renoncé à constituer un fichier recensant les personnes considérées comme des casseurs. À la place, la loi prévoit d’ajouter les personnes interdites de manifestation au fichier des personnes recherchées. Ainsi, pas de fichier, mais un fichage tout de même !

Enfin, les milliers de personnes cherchant à se protéger les yeux et le visage des gaz lacrymogènes et des projectiles de la police seront désormais menacées de 15 000 euros d’amende et d’un an d’emprisonnement pour avoir dissimulé leur visage. Et elles pourront être jugées en comparution immédiate si elles refusent de se disperser sur l’ordre de la police.

Cerise sur le gâteau, la loi permet aussi à l’État d’obliger une personne à payer pour les réparations de dégâts causés lors d’une manifestation, et ce, même si elle n’a pas été condamnée par la justice.

Le fichage et l’arrestation de manifestants, voire l’interdiction de manifestations, font depuis toujours partie des méthodes utilisées par l’État et sa police, souvent bien au-delà de ce que la loi autorise.

Avec son texte, que 50 députés LRM ont d’ailleurs refusé de voter, le gouvernement aggrave encore l’arsenal répressif destiné à défendre un ordre social de plus en plus injuste et violent.

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