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Dans le monde
Brésil : barrage dangereux et société pourrie
Le bilan de la rupture du barrage de la société minière brésilienne Vale ne cesse de s’alourdir. On compte désormais 134 victimes et 200 disparus, dont le pronostic de survie est fort mince. Les dégâts en termes de chômage, de dévastation, d’écologie seront à l’échelle de cette catastrophe.
Vale a fait tous les discours attendus en pareilles circonstances, débloqué des fonds pour les victimes, assuré s’occuper de ses autres barrages. Le gouvernement récemment mis en place a cru de son devoir d’exiger du géant minier qu’il cesse provisoirement d’utiliser ce même type de stockage de ses déchets. C’est un langage très peu crédible, alors que l’État brésilien n’a jamais rien fait qui puisse entraver les affaires et les profits de Vale. Le groupe conteste pourtant la décision devant les tribunaux car cette mesure reviendrait, dit-il, à réduire sa production de 10 %.
Pendant que les familles cherchent leurs morts, pendant que Vale et l’État jouent la comédie, les vautours profitent de l’aubaine. Il y a eu bien entendu des secousses sur le cours de l’action Vale, qui a chuté de 25 % avant de remonter. Des spéculateurs ont aussi immédiatement joué à la hausse le cours du fer, dont Vale est le principal exportateur mondial. La menace de réduction de la production brésilienne, alors que la demande chinoise est encore forte, devait, pariaient les spéculateurs, faire monter le cours. Il a grimpé en effet de 18 % suite à la catastrophe, faisant grossir d’autant, en 48 heures, le capital investi puis revendu au bon moment. Commentant l’événement, l’indicateur Bloomberg, propriété du milliardaire new-yorkais du même nom, titrait sobrement : « Les matières premières aiment la tragédie », et indiquait à ses lecteurs que c’était trop tard, la bonne affaire était passée.
Une autre conséquence spéculative de la catastrophe est la baisse spectaculaire d’un indice mesurant les prix pratiqués dans le transport maritime international. Vale transporte son minerai vers la Chine sur d’énormes minéraliers. La diminution des exportations brésiliennes rendrait ces minéraliers disponibles et, aiguisant la concurrence, ferait chuter les prix du transport de minerai. Cela entraînerait la baisse moyenne du prix du transport maritime, et donc entraîne par avance celle de l’indice qui les calcule. Sachant que cet indice est orienté à la baisse depuis des mois, sachant aussi que la crise financière de 2008 avait été précédée par une telle baisse, toutes les spéculations, tous les mouvements absurdes des rentiers milliardaires, de leurs ordinateurs stupides et de leurs gourous moutonniers sont à redouter. On se doute que l’indice en question entre dans d’autres calculs, d’autres indices, d’autres spéculations de casino, entraînant d’autres risques.
Les barrages de Vale, rongés par le profit, sont instables et criminels, et la société gouvernée par les lois du marché l’est tout autant.