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- Lutte ouvrière n°2635
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Editorial
Le 5 février et au-delà, se battre pour nos intérêts de travailleurs
Le week-end du 26 et 27 janvier a été riche en manifestations. 70 000 gilets jaunes ont continué à faire souffler un vent de contestation, pour le onzième samedi consécutif. Contre eux, les beaux quartiers ont péniblement rassemblé 10 000 manifestants pro-Macron, davantage émus par une vitrine brisée que par la casse sociale. D’autres rassemblements se sont aussi tenus pour la défense de l’environnement.
Alors pour débattre, oui, ça débat ! Et pas seulement dans le cadre voulu par le gouvernement, mais dans la rue, sur les places et dans les manifestations. Et ce, malgré la violence des forces de l’ordre contre les gilets jaunes, qui a fait 2 000 blessés, dont 157 au visage, 18 éborgnés et quatre mutilés par des tirs de flashball ou par des grenades de désencerclement.
Violences policières, loi anti-casseurs, le gouvernement aura tout tenté pour mettre fin aux manifestations. Mais ce climat de contestation est salutaire, parce que rien ne viendra du gouvernement.
Le grand débat se résume surtout à une série de one man shows présidentiels. On voit Macron partout, tout le temps. Il écoute, se montre ouvert à toute proposition concrète... tant qu’elle ne coûte rien, ni à l’État, ni à la bourgeoisie. Dans le cas contraire, il assène vertement sa leçon.
Ce fut le cas à Bourg-de-Péage dans la Drôme, où Macron n’avait plus affaire à des maires respectueux mais à des gens en colère. Exaspéré, il a répondu : « Il faut proposer des vraies réformes, mais la vraie réforme, elle va avec la contrainte, les enfants. » La semaine précédente, il avait déjà déclaré : « Les gens en situation de difficulté, on va davantage les responsabiliser, car il y en a qui font bien et il y en a qui déconnent. »
Traiter les travailleurs, les chômeurs et les retraités, comme des enfants qu’il faudrait raisonner, discipliner et contraindre, ça, Macron sait faire ! Il leur fait la morale, les culpabilise et veut leur faire porter tout le poids de la crise. Eh bien, qu’il continue, la colère n’en sera que plus grande.
S’il y a des comptes à demander, ce n’est pas aux plus pauvres ou aux chômeurs, qui ne sont responsables de rien. C’est à la classe capitaliste, qui fait et défait l’économie.
L’économie dépend de ces milliardaires qui sont, année après année, plus nombreux et plus riches, au point qu’ils concentrent entre leurs mains autant de moyens, si ce n’est plus, que les États eux-mêmes.
Cette poignée de capitalistes détermine notre façon de travailler et de gagner notre vie, de nous nourrir, de nous déplacer, de communiquer. Elle décide de ce qui est fait des profits accumulés, de les investir... ou pas. Autrement dit, elle engage l’avenir de la société. Mais, contrairement aux travailleurs, qui sont surveillés et contrôlés en permanence, elle est libre de faire ce qu’elle veut, comme elle veut.
Ford, PSA, Bic, la papeterie Arjowiggins : nombre de grands groupes ferment des usines et mettent les salariés sur le carreau. Ils en ont le pouvoir. Quand bien même il y a des repreneurs possibles, comme pour Ford à Blanquefort, les actionnaires préfèrent fermer parce qu’ils décident en fonction de leurs intérêts égoïstes, contre celui des travailleurs et de la collectivité. La seule façon de les empêcher de nuire est de les exproprier.
Quand l’État veut construire par exemple une ligne de chemin de fer, il réquisitionne les terrains et exproprie les particuliers au nom de l’intérêt général. Mais réquisitionner les usines que les grands groupes veulent fermer et qui ont été arrosées d’argent public, c’est tabou.
C’est un tabou que les travailleurs ont intérêt à faire tomber. Car demander des comptes à la classe capitaliste, contrôler ce qu’elle fait des milliards qu’elle a accaparés au travers de l’exploitation, c’est une nécessité.
Pour augmenter les salaires, il faut prendre sur les profits. Pour embaucher massivement – et il n’y a que cela qui résorbera le chômage de masse et améliorera les conditions de travail de tous –, il faut encore prendre sur les profits. Pour plus de justice sociale et d’égalité, il faut mettre en cause la classe capitaliste, contester ses décisions et son pouvoir.
Le 5 février, un appel à la grève est lancé par la CGT. Les travailleurs qui ont compris la nécessité de se lancer dans l’action pour défendre leurs intérêts doivent se saisir de cet appel et entraîner autour d’eux. Une journée de grève ne suffira pas, mais ce n’est qu’au travers de la mobilisation des salariés dans les entreprises que la contestation pourra franchir une nouvelle étape.
Éditorial des bulletins d’entreprise du 28 janvier 2019