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Dans les entreprises
Livreurs à vélo : combattre la mise en concurrence des travailleurs !
Ils avaient au dos leur sac trop grand en forme de cube aux couleurs flashy, devenu familier dans les grandes villes. Mais ce n’est pas pour livrer un burger ou une pizza qu’une quarantaine de livreurs de repas à vélo se sont réunis place de la République à Paris le 12 octobre.
En se réunissant à l’appel de l’un d’entre eux sur les réseaux sociaux pour protester contre la dégradation des conditions que leur impose la plateforme Deliveroo, les livreurs faisaient une tentative de briser leur isolement.
Travaillant pour des plateformes fonctionnant sur le même modèle qu’Uber, leur situation illustre comment le patronat utilise la concurrence pour imposer des conditions que la classe ouvrière avait été capable de refuser depuis des décennies.
Les livreurs liés à Deliveroo sont mis en concurrence pour le choix des créneaux, qui se fait en ligne. Les créneaux les plus recherchés échappent à ceux dont la connexion est trop lente ou qui ont une mauvaise notation par la plateforme : il faut, pour l’éviter, être parmi les plus assidus et les plus rapides à livrer. La pression est permanente : les délais pour livrer sont courts et parfois déjà écoulés lorsque le livreur reçoit l’ordre de livraison ! Il faut donc rouler à toute vitesse, dans le stress et les dangers de la circulation.
Depuis août 2017, la plateforme Deliveroo ne paye plus de tarif horaire mais un tarif à la course. Elle vient de décider de modifier celui-ci, ce qui se traduirait par des baisses de salaire de 200 à 300 euros par mois pour un livreur à temps plein.
Enfin, les plateformes imposent aux livreurs le statut de micro-entrepreneur : pas de droit au chômage, pas de congés payés ni de congé maladie. Il n’y a aussi aucune limite officielle à l’arbitraire du patron qui décide si, quand et combien le travailleur peut travailler.
Ces emplois de livreur semblent être de moins en moins souvent des jobs d’appoint, de plus en plus des activités principales à plein temps. Les travailleurs sont poussés à les accepter par la pression du chômage. Répondant au journal Le Monde, un porte-parole de Deliveroo brandissait contre les manifestants une menace en avertissant : « On travaille avec dix mille livreurs en France et, rien que la semaine dernière, quatre mille personnes ont postulé. »
Les manifestants n’étaient peut-être que quarante sur la place de la République, mais au fond ils mettaient leurs pas dans ceux de générations de travailleurs, dans la lutte toujours renouvelée contre l’exploitation et ce qu’Engels appelait déjà en 1845 le « nerf vital de l’ordre social actuel » : la concurrence imposée entre les travailleurs par les capitalistes.