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Iran : l’embargo américain aggrave la crise économique
Les 25 et 26 juin, des milliers de commerçants du grand Bazar de Téhéran ont manifesté contre la hausse spectaculaire des prix et l’effondrement de la monnaie, le rial, qui a perdu la moitié de sa valeur en six mois. Des manifestations similaires ont eu lieu dans plusieurs villes de province. Le 30 juin, dans le Khouzestan, des manifestations dénonçant la pollution de l’eau ont été violemment réprimées.
La vie chère, l’inflation, les pénuries ou les salaires non payés frappent en premier lieu les classes populaires. Cela a été l’une des causes des révoltes qui ont secoué le pays fin décembre et début janvier. Mais la décision de Trump de dénoncer l’accord sur le nucléaire et de réactiver l’embargo contre l’Iran a aggravé la crise économique. Les annonces d’entreprises étrangères, comme PSA ou Total, de se retirer du marché iranien, les menaces de rétorsion américaines envers les pays qui continueraient à acheter le pétrole iranien, servent de prétexte aux spéculateurs, nationaux ou internationaux, pour attaquer le rial.
Face à des hausses de prix spectaculaires, les magasins sont de plus en plus désertés par la population... à l’exception des bijouteries où ceux qui ont quelques économies viennent les convertir en or. Le porte-parole du conseil d’administration du Bazar de Téhéran a protesté « contre le taux de change élevé et la fluctuation des devises étrangères » qui empêcheraient les commerçants d’anticiper leurs achats et contre l’inaction du pouvoir accusé de ne pas soutenir la monnaie en vendant des devises étrangères. Il dénonçait aussi « le blocage des marchandises à la douane et le manque de critères clairs pour le dédouanement ». C’est une façon de viser les Pasdaran, les gardiens de la révolution, ou les ayatollahs et leur progéniture qui ont le quasi-monopole des importations et organisent délibérément la pénurie pour faire monter les prix.
Une telle déclaration du chef du Grand Bazar, une institution qui a soutenu le régime dès son accès au pouvoir, traduit la rivalité entre les privilégiés du pays pour contrôler le commerce. Il n’empêche que la haine du régime, exprimée par les travailleurs depuis janvier, semble s’étendre à la petite bourgeoisie frappée elle aussi par la crise économique. Dans la rue, des petits commerçants scandaient « Mort au dictateur » en visant Khamenei, le guide suprême, mais aussi « Quittez la Syrie » ou « Non à Gaza, non au Liban » pour dénoncer le budget englouti dans les opérations militaires du régime au Moyen-Orient.
L’incurie du régime islamique, la corruption et le mépris pour la population sont aussi à l’origine de manifestations contre la pollution de l’eau. Dans plusieurs régions du pays, le détournement à grande échelle des cours d’eau par des entreprises publiques ou des mafias liées aux ayatollahs a provoqué la désertification et la ruine des petits paysans. Dans le Khouzestan, l’eau distribuée au robinet n’est plus potable. Elle est parfois salée ou provoque des empoisonnements.
Plus d’une centaine d’habitants ont dû être hospitalisés récemment. À Khorramshahr et Abadan, deux villes de cette région, la colère a éclaté à la mi-juin, des manifestants s’en prenant à des bâtiments officiels. Le 29 juin, ils ont empêché l’accès à la prière du vendredi au cri de : « Ils nous volent l’eau au nom de la religion. » La réponse du régime a été la répression policière.
La répression, si féroce soit-elle, n’arrêtera pas la catastrophe sociale et économique aggravée par l’embargo américain. Elle ne semble pas non plus arrêter les classes populaires dans leur refus d’en supporter les conséquences.