La contre-offensive du monde du travail est nécessaire et possible28/03/20182018Journal/medias/journalarticle/images/2018/03/Une_2591_Manif_cheminots_45_C_LO.jpg.420x236_q85_box-0%2C1620%2C3456%2C3564_crop_detail.jpg

Editorial

La contre-offensive du monde du travail est nécessaire et possible

Illustration - La contre-offensive du monde du travail est nécessaire et possible

Avec quelque 500 000 manifestants dans le pays et pas loin de 50 000 à Paris, la journée du 22 mars a massivement mobilisé. Les infirmières, enseignants, employés des impôts… étaient bien plus nombreux dans la rue que lors de la manifestation du 10 octobre.

Pour les cheminots, qui se préparent à la grève à partir du 3 avril, cette journée se devait d’être réussie, et elle l’a été. Nombreux en grève et venus à Paris des quatre coins du pays, ils ont fait une démonstration de force.

Au-delà du nombre, cette journée a exprimé la volonté des manifestants de se battre ensemble. Les cortèges mélangeaient des cheminots avec et sans statut, des fonctionnaires titulaires et des contractuels, des jeunes tout juste embauchés et des retraités, conscients de partager des objectifs communs. Et cela aussi c’est un gage d’avenir car, pour gagner, le monde du travail se doit d’agir collectivement.

Dans la santé, dans l’éducation, dans la justice, partout l’État ferme des structures, rogne sur ses budgets et supprime des services. Heureusement, il y a ici ou là des réactions. Mais que pèsent ces contestations locales face à la puissance de l’appareil d’État ?

Dans le privé, face à la puissance du patronat, il en va de même. Ce n’est pas individuellement, ni service par service, métier par métier ou entreprise par entreprise, que les travailleurs peuvent se protéger des attaques.

Combien de fermetures d’entreprise ont montré qu’un ingénieur hautement qualifié et, à plus forte raison, des petits chefs sont aussi facilement licenciés qu’un ouvrier sans qualification ?

 « Diviser pour régner » a toujours été la politique du patronat et de l’État à son service. Opposer le public au privé, les CDI aux CDD ou les Français aux immigrés, c’est entrer dans leur jeu.

Aujourd’hui, il n’y a plus de place pour le « chacun pour soi » et le corporatisme.

Depuis que la crise a intensifié la concurrence, le patronat a besoin de mener une guerre de tous les instants aux travailleurs, pour préserver ses profits. Il s’en prend à tous et cherche à reprendre ce qu’il a lâché à certaines catégories. C’était moins vrai avant la crise et il arrivait que le grand patronat achète la paix sociale en accordant tel ou tel avantage aux uns ou aux autres. Mais cela marchait parce que le monde du travail dans son ensemble était craint et que le patronat redoutait que le moindre incendie ne s’étende. Les victoires que les travailleurs ont remportées secteur par secteur furent aussi et surtout le fruit d’un rapport de force global favorable à la classe ouvrière.

C’est à l’échelle de la classe ouvrière qu’il faut reconstruire aujourd’hui un rapport de force, pour résister aux reculs que Macron et la classe capitaliste veulent encore nous imposer.

Aussi loin que l’on remonte dans le passé, les seuls moments où la bourgeoisie a lâché du lest c’est lorsque les travailleurs se sont soulevés en masse, lorsqu’ils ont fait grève, manifesté et occupé les entreprises, comme en 1936 et en 1968.

En 1968, les travailleurs rejoignirent la grève avant même d’avoir formulé leurs revendications entreprise par entreprise, et parfois avant même tout appel syndical. Le ras-le-bol vis-à-vis du pouvoir étouffant de De Gaulle, la dureté de l’exploitation quotidienne et l’exemple de la révolte étudiante étaient des raisons suffisantes.

C’est la grève générale qui changea le rapport de force et la situation politique, conduisant le patronat à des concessions qui se traduisirent, selon les entreprises, par une réduction du temps de travail, des augmentations de salaire et de nouveaux droits syndicaux.

Pour Macron et ses supporters, aussi hostiles qu’étrangers au monde du travail, le mouvement ouvrier et les grèves feraient partie du vieux monde.
Mais que dénonçaient les travailleurs de 1968 ? Des horaires de travail insoutenables qui réduisaient la vie au « métro, boulot, dodo » ; des salaires indignes ; des conditions de travail dangereuses ; une arrogance et un mépris des directions et de la hiérarchie.

Il n’y a pas une seule de ces revendications qui ne soit d’actualité ! Il faut même ajouter à cette liste la garantie d’un emploi pour tous, la préservation des services publics et des retraites dignes de notre temps. Alors oui, un mai-juin 2018 est nécessaire !

Qui en ouvrira la voie ? Les cheminots, qui sont mis au pied du mur par Macron et qui se préparent à la grève dès le 3 avril ? Il faut le souhaiter et en faire notre combat. Une victoire des cheminots serait un camouflet pour le gouvernement et le patronat, et elle ouvrirait bien des perspectives au monde du travail.

Éditorial des bulletins d’entreprise du 26 mars 2018

Partager