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Dans les entreprises
Ford – Bordeaux : toute une région menacée
En annonçant sa volonté de se désengager du site FAI de Blanquefort, sur lequel il estime que les perspectives ne sont plus saines à partir de mi-2019, Ford condamne à terme 900 emplois directs et des milliers d’emplois induits. C’est toute la région que Ford menace une nouvelle fois d’une saignée d’emplois.
Attiré en Gironde dans les années 1970 par les subventions publiques, ce site Ford était au début des années 2000 le plus gros employeur privé de la région. Plus de 3 600 salariés produisaient alors des boîtes de vitesses automatiques et manuelles pour toutes les usines Ford d’Europe. Mais en 2007, après avoir coupé physiquement et juridiquement le site en deux usines (avec 900 travailleurs toujours en activité sur le second site Getrag Ford), l’usine FAI ne comptait déjà plus que 1 800 travailleurs quand Ford annonça sa volonté de la fermer.
Malgré une semaine de grève et plusieurs manifestations à Bordeaux et à Paris, Ford se débarrassa début 2009 de l’usine en la donnant à un obscur repreneur industriel, HZ Holding, qui, pour obtenir le soutien financier des pouvoirs publics, avait annoncé qu’il voulait y construire des couronnes d’éoliennes. Il devint en fait assez vite évident que Ford avait sous-traité auprès de HZ Holding la fermeture de l’usine. HZ l’annonça fin 2010, après avoir puisé 7 millions dans la caisse pour les actionnaires.
Devant le fiasco de la reprise industrielle, sous la pression des travailleurs mais aussi parce que les collectivités locales et l’État s’engageaient à subventionner largement Ford, le trust de l’automobile reprit l’usine en 2011 avec la promesse, jamais tenue, de garder 1 000 emplois et de pérenniser le site.
Le plan de subventions publiques, qui se monte à 50 millions d’euros sous diverses formes depuis 2011, arrive maintenant à terme. Ford, qui a fait 7,6 milliards de dollars de bénéfices en 2017, a annoncé le 27 février qu’il se désengage du site. Il était en fait évident depuis des mois qu’il n’envisageait pas d’avenir sur le site au-delà de ces subventions. De comité de suivi des accords de 2011 en comité de suivi, l’entreprise, avec la complicité des pouvoirs publics qui ne pouvaient pas ne pas être au courant, promenait les travailleurs, ce qu’ont dénoncé à plusieurs reprises les syndicats.
Vendredi 2 mars, le gouvernement a reçu élus locaux et syndicats à Bercy. Son empressement traduit en fait sa crainte de voir la colère ouvrière exploser. Au moment même où le ministre Bruno Le Maire annonçait aux syndicats qu’il avait l’engagement de Ford de rester jusque fin 2019, l’entreprise annonçait qu’elle recherchait un repreneur dès maintenant !
Le sentiment des travailleurs, exprimé lors d’une assemblée générale le 5 mars, est d’avoir été une nouvelle fois trahis. Après avoir touché tant de subventions et promis la pérennisation du site, Ford lâche de nouveau l’usine. Quant à la comédie qui se dessine autour d’un repreneur industriel, l’avis quasi unanime, fruit de l’expérience HZ, est que c’est un miroir aux alouettes.
Pour faire reculer Ford, les travailleurs ne pourront compter que sur leurs propres mobilisations collectives. Face à Ford et aux pouvoirs publics, au sein des usines FAI et Getrag, ils devront se manifester et essayer aussi, partout où cela sera possible, d’entraîner avec eux les travailleurs de la région. Une journée usine morte et une manifestation en ville ont été décidées pour vendredi 9 mars, à l’occasion d’un nouveau comité de suivi à la préfecture. Il est de l’intérêt de tous les travailleurs de la région que cette manifestation soit réussie.