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Leur société
Saint-Denis : deux ans après l’assaut de la police, le scandale continue
Si les médias se sont penchés sur le sort des victimes des attentats du 13 novembre, ils demeurent beaucoup plus silencieux sur le sort réservé aux victimes de l’assaut de la police le 18 novembre 2015, au 48, rue de la République à Saint-Denis.
Sans avoir évacué l’immeuble où s’étaient réfugiés Abdelhamid Abaaoud et l’un de ses complices, les policiers l’ont mitraillé, le détruisant en grande partie et obligeant les familles à se calfeutrer pendant de nombreuses heures dans l’angoisse, sans aucune information. Quatre habitants ont été grièvement blessés par balles. La plupart des résidents ont été évacués après l’assaut, parfois dix, voire vingt-quatre heures après.
Ces familles, comptant de nombreux enfants, ont eu le sentiment d’être en zone de guerre. Pourtant, dès le départ, l’État, représenté par le préfet, les a traitées avec le mépris qui le caractérise face à des familles populaires d’origine immigrée. Hébergées dans un premier temps dans un gymnase, ce sont les habitants de la ville, solidaires, qui leur ont apporté une vraie aide. Les familles ont eu l’interdiction de rentrer dans leur immeuble d’origine, et n’ont même pas pu récupérer leurs biens. Il a fallu que les habitants du 48 s’organisent en association pour faire valoir leurs droits, empêcher l’expulsion de trois sans-papiers qui avaient reçu des ordres de quitter le territoire et exiger le statut de victimes du terrorisme.
Deux ans après, force est de constater que le mépris de l’État pour ces victimes est toujours la règle. Plus de la moitié des habitants ne sont toujours pas relogés, seize personnes sont hébergées à l’hôtel, dont onze dans un hôtel miteux de L’Île-Saint-Denis. Dans ce dernier, il y a deux toilettes et trois douches sans eau chaude pour tout le monde. Les habitants ne peuvent pas laisser de nourriture sur les tables et sont obligés de tout accrocher parce que les souris viennent tout dévorer. Les autorités ont trouvé tout à fait normal de loger dans la même chambre des voisins sous prétexte qu’ils étaient tous du 48. Et les résidents ont l’interdiction d’amener leurs bagages ! Pire, trois habitants sont aujourd’hui dans la rue, dont un homme de 60 ans, malade, qui n’a d’autre solution que de dormir dans sa voiture. Les prétextes invoqués pour mettre fin à cet hébergement d’urgence sont divers : l’un, malade, a été hébergé quelques jours chez des amis, la préfecture et la mairie ont donc estimé qu’il a d’autres solutions. L’autre est parti dans sa famille au pays.
Après l’assaut, les autorités avaient affirmé qu’elles regarderaient avec bienveillance les demandes de régularisation des sans-papiers mais trois d’entre eux ont été déboutés. Quant aux procédures d’indemnisation des victimes, elles traînent en longueur et sont dérisoires quand elles sont versées.
L’un des habitants résumait la situation en disant avoir le sentiment « d’être un cadavre enterré les pieds dehors ». Les habitants ont donc décidé de manifester le 18 novembre, jour anniversaire de l’assaut, devant l’immeuble du 48, rue de la République, à Saint-Denis, à 11 heures. Ils appellent à venir les soutenir nombreux.