Europe : l’Union organise la chasse aux migrants08/11/20172017Journal/medias/journalnumero/images/2017/11/2571.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Europe : l’Union organise la chasse aux migrants

La mort de milliers de migrants en Méditerranée n’incite pas les États européens à ouvrir leurs frontières. Ils préfèrent tenter de les arrêter à tout prix avant même leur départ d’Afrique.

L’Union européenne a ainsi offert au gouvernement du Niger 140 millions d’euros en 2016 pour fermer la voie par laquelle transitaient les trois quarts des migrants en provenance d’Afrique centrale et occidentale. La route entre Niamey et Agadez, point de départ vers le désert libyen, est aujourd’hui étroitement contrôlée par la police. Elle vérifie les cartes d’identité, dont la plupart des migrants sont dépourvus, lors de la vente des billets de car et leur interdit ainsi ce moyen de transport autrefois habituel. Bien des migrants restent bloqués sur place, d’autres choisissent de se lancer vers Agadez sur les itinéraires détournés, à bord de véhicules de brousse, quitte à devenir la proie de coupeurs de route. Certains enfin rentrent dans leur pays d’origine, à la grande satisfaction des dirigeants européens.

En Libye, un accord du même type a été signé entre l’Italie et le gouvernement dit d’union nationale basé à Tripoli, et d’autre part entre celui-ci et l’Union européenne, pour empêcher les migrants de prendre la mer. Lorsque le port de Sabratha, d’où partaient 80 % des migrants, a été repris aux trafiquants qui l’occupaient, 15 000 clandestins y croupissaient dans des prisons, en proie aux mauvais traitements, aux viols et aux sévices. Ils sont aujourd’hui transférés dans des centres de rétention qualifiés d’officiels, à Tripoli notamment. Ces prisons sont tenues par des milices tout aussi sanguinaires. Les migrants y subissent les mêmes sévices et les trafiquants, liés aux milices, peuvent les enlever comme ils veulent au sein même du centre.

Les gouvernements européens se réjouissent aujourd’hui d’une certaine diminution du nombre de migrants tentant de franchir la Méditerranée. Mais comment parler ainsi, quand on sait au prix de quelles violences cette prétendue réduction est obtenue ? Ces obstacles n’empêchent d’ailleurs pas que des femmes, des hommes et des enfants continuent de tenter la traversée et de mourir noyés. Vendredi 3 novembre, les corps de 23 migrants ont été retrouvés en mer au cours d’une opération de sauvetage d’un canot au large de la Libye. Environ 700 autres personnes ont été sauvées dans la journée. La veille, sept personnes avaient été retrouvées mortes au cours de plusieurs opérations de secours qui avaient permis de sauver 900 personnes. Et en tout, depuis le début de l’année, au moins 2 826 migrants sont morts ou ont disparu en mer, tandis que 150 000 environ sont arrivés en Europe par la Méditerranée, selon l’Organisation internationale pour les migrations.

La politique des pays européens relève d’un calcul cynique. Leurs dirigeants préfèrent que les migrants périssent dans la brousse, le désert ou les prisons libyennes, et avant tout loin des caméras. Ils financent les dictateurs et les bandes armées locales pour tenir le rôle de gardiens d’un continent transformé en prison.

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