Thomé-Génot – Nouzonville : justice de classe01/11/20172017Journal/medias/journalnumero/images/2017/11/2570.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Thomé-Génot – Nouzonville : justice de classe

En 2006, deux patrons américains, Gregory Willis et Catherine Zickfeld, fermaient l’usine Thomé-Génot de Nouzonville, dans les Ardennes, et mettaient à la rue 350 salariés. Après s’être enrichis en organisant cette faillite frauduleuse, ils vont aujourd’hui toucher un supplément de l’État français, qui vient d’être condamné à leur verser 20 000 euros de dommages et intérêts.

La justification de cette décision du tribunal de grande instance de Paris est à dormir debout. Bien que condamnés à l’époque, en leur absence, pour banqueroute par détournement et abus de bien sociaux, les patrons voyous affirment n’avoir jamais été informés de la procédure. Les convocations leur auraient été adressées à Nouzonville, ville dont ils se sont prudemment enfuis après leur méfait, et non à Los Angeles et à Santa Barbara en Californie, où ils résident depuis lors et dépensent l’argent volé.

Thomé-Génot, la principale usine de Nouzonville, était un sous-traitant des grandes marques automobiles et fabriquait notamment des pôles d’alternateurs dont elle avait le brevet. Les deux escrocs la rachetèrent pour un euro en 2004 et vidèrent l’entreprise de tous ses avoirs, vendant le patrimoine immobilier, transférant les brevets, payant des salaires très élevés aux cadres. Jusqu’à ce matin d’octobre 2006 où les salariés, en se rendant au travail, apprirent stupéfaits que l’usine était fermée. L’État avait laissé partir les patrons voyous, mais il envoya les CRS contre les ouvriers qui occupaient les locaux et la population qui les soutenait. Depuis, bien des travailleurs n’ont pas retrouvé d’emploi, et la petite ville de Nouzonville dépérit.

Si la justice sait se montrer compréhensive envers les capitalistes, elle a eu la main lourde avec les travailleurs de Thomé-Génot. En juillet dernier la Cour de cassation a condamné 47 d’entre eux à rembourser chacun entre 6 000 et 24 000 euros. Ils avaient été repris par une société créée dans les anciens locaux de Thomé-Génot, Ardennes forge, laquelle avait fait faillite à son tour après deux ans d’existence, . Le patron d’Ardennes forge avait empoché de généreuses aides publiques pour former les travailleurs de Thomé sur des machines qu’ils utilisaient depuis des dizaines d’années ! À l’issue de cette seconde faillite frauduleuse, les Prud’hommes avaient accordé des indemnités aux licenciés d’Ardennes forge. Mais l’AGS, l’organisme patronal qui verse les salaires en cas de faillite d’une entreprise, s’est acharné juridiquement contre les travailleurs concernés, jusqu’à obtenir un jugement les obligeant à rembourser des sommes depuis longtemps dépensées.

Les patrons ont la justice de leur côté. Mais les anciens de Thomé-Génot ne lâchent rien et se mobilisent depuis ce jugement inique pour refuser de payer.

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