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Dans les entreprises
Alstom : pas de bonne option dans le Monopoly capitaliste
L’annonce du projet de fusion d’Alstom avec la branche ferroviaire du groupe Siemens, avec le soutien du gouvernement, a déclenché une levée de boucliers des souverainistes qui dénoncent le passage d’un « fleuron industriel français » sous le contrôle allemand.
Les travailleurs d’Alstom ont toutes les raisons d’être inquiets. Ils sont bien placés pour savoir ce que valent les garanties sur « le maintien des emplois pour quatre ans ». Les mêmes « garanties » avaient été données en 2014 à ceux de la branche énergie d’Alstom lors du rachat de celle-ci par General Electric (GE). Deux ans plus tard, GE annonçait un plan de 6 500 suppressions de postes en Europe. À Grenoble, les travailleurs de l’usine GE Hydro (ex-Alstom) se battent actuellement contre la suppression de 350 emplois sur 800.
La direction bien française d’Alstom supprime des emplois par milliers depuis des années, au fil des multiples restructurations qui ont jalonné l’histoire de l’entreprise, avec ou sans rachats par des groupes étrangers. Ces derniers mois, malgré les millions de subventions publiques et les commandes de nouvelles rames de TGV annoncées par Hollande juste avant les élections présidentielles, sous prétexte de « sauver » l’usine de Belfort, l’hémorragie d’emplois n’a pas cessé.
Dans une économie en crise, où les investissements sont poussifs et remplacés par des opérations financières, les capitalistes augmentent leurs bénéfices en aggravant l’exploitation et en multipliant les opérations de fusions-acquisitions. Ainsi il y a six mois, le français PSA rachetait l’allemand Opel au constructeur américain GM, pour 2,2 milliards d’euros, sans que les souverainistes n’y trouvent à redire. C’est aujourd’hui le cas du secteur du matériel ferroviaire où les trois constructeurs implantés en Europe, Alstom, Siemens et Bombardier sont à la fois des concurrents et des alliés potentiels. Chacune de ces entreprises possède des usines en France et en Allemagne. En toute opacité pour les travailleurs, des négociations parallèles se mènent depuis des mois entre eux.
Les partisans de la fusion Alstom-Siemens, option visiblement privilégiée par les actionnaires, promettent la création d’un géant européen du ferroviaire capable de rivaliser avec la compagnie chinoise CRRC, qui serait une menace pour les firmes européennes. Si CRRC est la première compagnie mondiale par son chiffre d’affaires, elle n’a pourtant obtenu à ce jour en Europe qu’un petit marché en Macédoine et un contrat pour trois rames de trains en Tchéquie.
Les défenseurs de la souveraineté industrielle française, aux relents germanophobes, réclament quant à eux l’entrée de l’État au capital d’Alstom. Mais quand l’État entre au capital, c’est pour défendre les intérêts des actionnaires, pas ceux des travailleurs. En 2004, sous l’égide de Sarkozy, l’État avait racheté 21 % des actions d’Alstom en difficulté avant de les revendre à Bouygues. Cela n’a sauvé aucun emploi. Depuis la vente de la branche énergie à GE, Bouygues cherche à se retirer d’Alstom, pas assez rentable à ses yeux. L’État a pris une option d’achat sur les actions de Bouygues, qui court jusqu’au 17 octobre, lui servant ainsi d’assureur.
Les travailleurs ne doivent faire confiance ni à ceux qui réclament la nationalisation d’Alstom au nom des « intérêts de la France » ni à ceux qui opposent l’industrie européenne à celle de la Chine ou des États-Unis. Pour se défendre, ils ne peuvent compter que sur leur force collective, quelle que soit leur nationalité ou celle de leur patron.