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Editorial
Des attentats que les mesures sécuritaires ne peuvent arrêter
Il n’aura pas fallu longtemps, après l’attentat de Berlin, pour que nombre de politiciens sautent sur l’aubaine, reprennent leurs refrains habituels et rivalisent de propos réactionnaires.
En Allemagne, l’extrême droite mais aussi des membres de son propre parti s’en sont pris à Angela Merkel en l’accusant d’avoir facilité la venue de terroristes en laissant entrer des réfugiés. En France, le FN mais aussi les politiciens de droite se sont étonnés que l’auteur de l’attentat ait pu prendre le train et passer d’Allemagne en France et en Italie. Ils en profitent pour répéter qu’il faut repousser les réfugiés et clore les frontières. Et tous d’affirmer, gouvernement compris, qu’il faut plus de mesures sécuritaires et encore plus de moyens à la police et à l’armée pour traquer les terroristes.
Cela fait des années que l’on entend cela, sans que les mesures policières aient empêché des attentats comme ceux de Paris, de Nice ou de Berlin, et sans qu’elles aient découragé les vocations terroristes, bien au contraire.
De tels attentats, frappant des personnes au hasard, sont ignobles. Mais aucune mesure sécuritaire n’empêchera jamais un homme décidé à semer la mort, quitte à y laisser sa propre vie, de passer les frontières pour mener à bien son projet. Tous ces politiciens le savent et ne font que tenter d’exploiter l’émotion provoquée par les attentats.
Faire l’amalgame entre terroristes et migrants est choquant, et aussi tout simplement faux. Les auteurs des attentats commis en France étaient nés et avaient vécu dans le pays. Quant aux migrants venus du Moyen-Orient ou d’Afrique, ils fuient justement le terrorisme qui y sévit. Ils fuient un quotidien fait d’attentats, de répression, de massacres commis par des régimes de dictature, mais aussi par des milices comme celle de Daech.
Les migrants fuient des bombardements massifs qui n’émanent pas seulement de la Russie, mais aussi des États-Unis ou de la France. Car en Syrie, en Irak, les États occidentaux interviennent depuis des années, s’arrogent le droit d’envoyer leurs armées, de soutenir des dictateurs puis de tenter de les renverser et d’écraser les populations sous les bombes. Le prétexte est toujours de rétablir la paix, mais la raison réelle est de maintenir leur influence dans cette région au profit de leurs compagnies, pétrolières ou autres.
Les dirigeants des grandes puissances prétendent défendre la civilisation contre la barbarie, mais leur politique se résume à défendre un système barbare, par des moyens barbares, en s’appuyant sur des régimes barbares et en fournissant les armes. Cela nourrit le terrorisme, et quand des attentats ont lieu dans les pays européens, ils ne sont qu’un épisode de la guerre qui se déroule depuis des années au Moyen-Orient.
Les mesures sécuritaires, les policiers et soldats déployés dans les villes, les contrôles aux frontières, l’état d’urgence prolongé n’y changeront rien. Ils ne feront qu’installer un peu plus au cœur de l’Europe l’état de guerre qui sévit déjà depuis des années de l’autre côté de la Méditerranée, pendant que des politiciens saisiront cette occasion de surenchérir dans les discours réactionnaires. C’est aussi pour eux le moyen de faire oublier leurs responsabilités, non seulement dans cette situation de guerre, mais dans la crise et la misère qui s’étendent ici-même.
La propagande xénophobe et raciste du FN et d’autres est elle aussi le moyen de rejeter sur les migrants, sur les étrangers, des responsabilités qui sont celles du système capitaliste et des politiciens bien français. Les travailleurs ne doivent pas accepter de se laisser ainsi diviser !
La campagne électorale qui s’annonce sera pour la plupart des politiciens, de droite mais aussi de gauche, l’occasion de broder sur ces thèmes, de renchérir sur les questions de sécurité, de contrôle des frontières, de rejet des migrants. Ce seront autant de moyens d’éviter de parler de l’essentiel, d’esquiver les problèmes réels rencontrés par la population travailleuse : le chômage qui ne baisse pas, la vie qui devient plus dure pour beaucoup.
Eh bien, ce sont ces problèmes-là qu’il faut mettre sur la table. Il faut faire entendre les exigences des travailleurs ; non seulement ils ne veulent pas être engagés dans une guerre qu’ils n’ont pas voulue, mais ils en ont assez de payer pour la crise d’un système dans laquelle ils n’ont aucune responsabilité.
C’est tout le bien qu’il faut souhaiter aux travailleurs en cette nouvelle année. Lutte ouvrière y apportera sa contribution, notamment par la voix de sa candidate à l’élection présidentielle, Nathalie Arthaud.
Éditorial des bulletins d’entreprise du 26 décembre 2016