Union européenne : un futur qui ressemble au passé29/06/20162016Journal/medias/journalnumero/images/2016/06/2500.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Union européenne : un futur qui ressemble au passé

Depuis le 24 juin et le vote en faveur du Brexit, les responsables politiques, administratifs, économiques et financiers de l’Union européenne s’agitent comme du pop-corn dans une poêle. Dans tous les pays, les nationalistes pavoisent, mais les politiciens au pouvoir, agissant pour le compte du grand patronat, essaient plutôt de calmer les esprits.

Leur première préoccupation est d’éviter un emballement spéculatif, commencé la nuit même du dépouillement du scrutin et poursuivi depuis. Les fonds spéculatifs se sont en effet jetés sur la monnaie britannique et sur toutes les valeurs susceptibles d’être affectées par la situation, à commencer par les valeurs bancaires. La livre sterling s’effondre, les banques baissent, les Bourses reculent. Pour tenter de colmater la brèche, les responsables politiques et financiers n’ont, comme toujours, que deux remèdes : les bonnes paroles et les milliards. La Banque d’Angleterre, suivie des autres banques centrales et de la Banque centrale européenne, annonce donc qu’elle est prête à injecter des centaines de milliards d’euros pour aider les banques privées à faire face. Au mieux, cela gonflera encore un peu plus la bulle spéculative ; au pire, cela la fera éclater immédiatement, au risque d’entraîner le monde dans une nouvelle récession, comme en 2008, voire dans une crise catastrophique. L’instabilité de l’économie capitaliste est telle que la simple stupidité politique du Premier ministre d’un pays impérialiste peut catalyser l’explosion.

Outre le système financier, le Brexit menace également la construction politique de l’Union européenne, en donnant des ailes aux démagogues réactionnaires de chaque pays. Hollande, Merkel et Renzi, le Premier ministre italien, réunis à Berlin le 27 juin, ont donc promis un nouvel élan, dans le cadre de l’Union européenne, pour contrecarrer les progrès des nationalistes. Mais, ensemble ou séparément, mettant en œuvre la politique du grand capital, ils ne feront rien de mieux que ce qu’ils ont fait jusqu’à aujourd’hui. Hollande, Merkel et compagnie continueront à faire peser le poids de la crise sur les travailleurs. Ces mêmes politiciens continueront à prétendre que l’Europe est responsable de cette situation. D’autres, sur leur droite, voire sur leur gauche, démagogues de tout poil, renchériront dans l’absurdité nationaliste. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, référendums et sorties de l’Union peuvent se multiplier.

La superstructure politique de l’Union européenne n’est que l’habillage, le décorum de l’union réelle, celle constituée par les grands groupes capitalistes pour encadrer leur concurrence et élargir la base de leur puissance. Aujourd’hui, cette union-là n’est pas immédiatement menacée, tout simplement parce qu’elle correspond aux besoins et aux possibilités actuelles du grand capital. Pour le bon fonctionnement du marché capitaliste européen, les diplomates, les fonctionnaires de l’Union, les dirigeants des entreprises trouveront de nouveaux arrangements, quitte à écrire de nouvelles lois. Ils ont déjà commencé, et c’est pour cela qu’ils prennent leur temps pour rendre effectif le divorce, si même ils ne parviennent pas, en fin de compte, à l’éviter. Pour cette fois, il ne s’agit pas de partager les biens du ménage, mais de continuer à les faire fructifier ensemble.

Les travailleurs seront donc les seuls à payer l’addition ; d’abord, par les politiques d’austérité qui vont se poursuivre, en Grande-Bretagne comme sur le continent ; ensuite, par les divisions introduites dans leurs rangs et par l’affaiblissement qui en découle ; enfin, par le sombre avenir que le Brexit et ses suites pourraient préparer.

La montée des nationalismes dans les différents pays européens est une menace directe pour les travailleurs. En dressant les différentes catégories de travailleurs les unes contre les autres, en tentant de transformer une partie de la classe ouvrière en garde-chiourme de l’autre partie, les partis nationalistes laisseraient les mains libres aux exploiteurs. Les politiques nationalistes dresseraient les pays les uns contre les autres, comme cela commence à être le cas en Europe centrale, faisant des réfugiés et des minorités des victimes expiatoires toutes désignées. Les tensions suscitées par les groupes nationalistes, à l’échelle d’un pays ou d’une région, pourraient de surcroît conduire à la constitution de gouvernements à poigne. Là encore, les travailleurs et les pauvres en général, natifs ou pas, seraient les premiers à en pâtir.

L’Europe que le Brexit annonce, celle des gesticulations des nationalistes, de l’impuissance des politiciens, de la toute-puissance du capital, c’est celle des années 1930.

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