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Lille : condamnation inique d’un manifestant
Jeudi 9 juin se déroulait le procès d’Antoine, jeune militant CGT arrêté au début de la manifestation du 17 mai à Lille. Ce jour-là, les CRS avaient délibérément coupé le cortège alors que la manifestation venait de s’élancer sans le moindre incident. Des policiers en civil, sans brassard ni signe de reconnaissance visible, s’étaient jetés sur Antoine et l’avaient plaqué au sol, avant de procéder à son arrestation avec une grande brutalité.
À l’issue de sa garde à vue, Antoine a refusé la comparution immédiate, afin de préparer sa défense. Ce refus d’une justice expéditive lui a valu d’être aussitôt incarcéré pendant trois semaines, dans l’attente de son procès. La détention préventive, d’après la loi, est réservée aux cas où la personne présente un danger pour autrui, ou lorsqu’elle risque de fuir. Dans le cas d’Antoine, c’était absurde. Mais le juge a dit qu’il n’était pas question que d’autres manifestants croient qu’ils seraient libérés s’ils refusaient la comparution immédiate.
Au procès, les motifs de l’accusation sont apparus ubuesques : le chétif militant était accusé d’avoir blessé une armoire à glace de la BAC en lui assénant un coup de poing n’ayant occasionné aucun jour d’interruption de travail. Les témoignages contradictoires d’un des policiers, déclarant dans un premier temps ne pas avoir vu la scène car son collègue lui cachait la vue, puis affirmant le lendemain qu’il avait clairement vu le coup de poing, auraient dû suffire à anéantir l’accusation. Mais visiblement, il s’agissait de faire un exemple.
De même, lors du visionnage d’une vidéo, un violent coup de pied asséné à Antoine alors qu’il est déjà maîtrisé au sol par trois colosses, le visage écrasé contre le bitume, est devenu un geste technique destiné à lui faire plier les jambes. Et le tout à l’avenant.
Les trois témoins de la défense ont été malmenés, soupçonnés d’être influencés par leurs engagements politiques, et leurs propos déformés par la procureure. Malgré toute sa détermination à condamner Antoine, celle-ci a d’ailleurs été obligée d’admettre qu’Antoine n’était pas un casseur. Ce qui ne l’a pas empêchée de requérir huit mois de prison avec sursis pour violence envers la police, et deux mois pour avoir refusé les prélèvements lors de sa garde à vue, ainsi qu’un an d’interdiction de manifester à Lille. Le tribunal a suivi ces réquisitions iniques, pour la prison avec sursis, mais a aussi prononcé deux ans d’interdiction de manifester dans tout le département.
Finalement, après neuf heures d’un procès qui s’est terminé à minuit, Antoine a tout de même été libéré, à la grande joie de la soixantaine de militants toujours présents devant le tribunal, des centaines s’étant relayés tout au long de la journée. C’est évidemment un soulagement, mais sa condamnation reste scandaleuse. Une justice de classe, qui veut faire payer cher aux militants leur engagement !